Tambour (Le)

Tambour (Le)
Titre original:Tambour (Le)
Réalisateur:Volker Schlöndorff
Sortie:Cinéma
Durée:163 minutes
Date:19 septembre 1979
Note:
Le petit Oscar naît à Dantzig en 1924. Seule la promesse de sa mère qu’il aura un tambour pour ses trois ans l’empêche de vouloir retourner immédiatement dans le confort douillet de ses entrailles. Le jour de son troisième anniversaire, Oscar est tellement repoussé par l’attitude des adultes, qu’il décide de ne plus vouloir grandir. Afin de mettre en pratique ce vœu, il se jette de l’escalier de la cave. Dès lors, il garde sa taille de gamin de trois ans. Il devient alors l’observateur des infidélités de sa mère et de la montée du nazisme. Tout en battant imperturbablement son tambour, dont il ne se sépare jamais, et en faisant éclater le verre par la seule force de sa voix aigu, Oscar verra ses proches disparaître par sa faute.

Critique de Tootpadu

La monstruosité est au cœur de cette adaptation du roman de Günther Grass, qui avait été récompensée à l’époque de sa sortie par tous les prix imaginables de la profession, de la Palme d’Or jusqu’à l’Oscar du Meilleur Film étranger. Une consécration pareille a tendance à nous paraître suspecte, et cela d’autant plus que nous arrivons toujours pas à nous enthousiasmer pour ce film dépourvu d’un propos clair, mais surchargé de toutes sortes de poncifs. La mise en scène de Volker Schlöndorff multiplie en effet les ruptures de ton et les références à des cinéastes aussi complémentaires que Federico Fellini, pour la séquence du pique-nique sur le bunker à la plage et l’ascension des bonnes sœurs, et David Lean, par le biais des derniers plans du film, qui rappellent forcément l’emphase épique du Docteur Jivago. Mais cette érudition cinématographique et le recul par rapport à l’atrocité de certains faits de l’action ne produisent nullement un fil narratif susceptible de nous inciter à prendre réellement part au triste sort de ce garçon à la croissance brusquement interrompue.
Le retard qu’Oscar a pris physiquement sur les enfants de son âge est mis en avant plus qu’une fois. Le doute plane cependant quant à ses capacités mentales qui auraient pu également être affectées par sa chute volontaire. Du coup, sa narration à la voix stridente est au mieux un commentaire cruel des choses abjectes qui se passent autour de lui, et auxquelles il ne participe qu’en tant qu’élément perturbateur mineur. Son point de vue est empreint d’une grande subjectivité, ce qui fait alterner le récit assez peu organiquement entre la farce et l’horreur, la comédie de mœurs et la reconstitution historique approximative. Il existe néanmoins un point commun dans cette cacophonie indigeste, encore accrue par un travail considérable pour rendre la bande son plus agaçante : un rapport très viscéral au monde qui passe avant tout par une volupté charnelle rarement de bon goût. Dès son plus jeune âge, le personnage principal éprouve des sentiments ambigus à l’égard de l’attitude vulgaire des adultes, ce qui le pousse à la fois à se fermer au style de vie licencieux de ses proches et à être fasciné par cette quête effrénée du plaisir sexuel. De cette dichotomie philosophique naît un récit qui n’est pas moins schizophrène, puisqu’il égrène toute une série de symboles lourds de sens, qui sont censés représenter le dilemme d’Oscar. Or, le fruit de ce purgatoire des pulsions et des coups de théâtre absurdes est une immense vacuité du propos, dont Le Tambour ne se relève jamais.
Autant la mise en scène produit des images qui s’enfoncent jusqu’au plus profond de notre mémoire – avant tout parce qu’elles font appel aux plus bas instincts –, autant tout ce cirque ne rime à rien. Le plébiscite de ce film ampoulé peut se comprendre par sa façon fort triviale d’associer une époque charnière de l’Histoire allemande à un destin d’enfant défavorisé, mais pareil chantage aux sentiments ne fonctionne guère auprès de nous, surtout lorsqu’il s’articule à travers un film aussi brouillon et débordant de platitudes.

Revu le 23 août 2011, à l’Arlequin, Salle 2, en VO

Note de Tootpadu: