Confidences sur l'oreiller

Confidences sur l'oreiller
Titre original:Confidences sur l'oreiller
Réalisateur:Michael Gordon
Sortie:Cinéma
Durée:99 minutes
Date:16 décembre 1959
Note:
A New York, la demande de lignes téléphoniques dépasse l'offre et les compagnies installent alors des lignes partagées. Parmi les utilisateurs de celles-ci, Jan Morrow, une décoratrice d'intérieur célibataire, qui n'en peut plus des interminables conversations romantiques avec lesquelles Brad Allen, un compositeur séduisant, bloque leur ligne. Rien ne semble pouvoir apaiser la guerre des nerfs entre les deux abonnés, même pas la rencontre amoureuse de Jan avec Rex Stetson, un fermier texan très bien élevé, qui est en fait Allen, incapable de résister aux charmes de Jan et conscient qu'il n'aura aucune chance avec elle s'il lui révèle sa véritable identité.

Critique de Tootpadu

Où commencer pour cerner la décadence involontaire dont cette comédie brille sans modération ? Peut-être en constatant que Bye-bye love n'est qu'un pastiche gentillet qui énonce platement tous les sous-entendus savoureux et salaces qui pimentent cette histoire-ci. Car le contenu de cette intrigue, y compris la prémisse particulièrement laborieuse et datée, dispose de moins d'intérêt que toutes les implications sociologiques qu'il cache sans trop d'application.
Il suffit de décoder ces confidences et leur tentative d'établir un univers à la fois respectable et frivol pour voir leur taux de divertissement décupler. Quelle importance que Rock retrouve sa Doris à la fin, c'est le chemin incroyablement tortueux, complexé jusqu'à la saturation, qui compte. Sur cette route glissante des conversations à demi-mot, des regards langoureux et des confusions de genre, les coups ratés honteux révèlent plus que les affirmations décomplexées de la relecture récente. Les vannes homophobes, qui étaient si ignobles dans Le Chouchou du professeur, une autre comédie de Doris Day de l'année précédente, revêtent ici une couleur plus tragique, à cause de la présence de Rock Hudson, le pédé honteux le plus célèbre de l'après-guerre hollywoodien.
Il y a quelque chose de touchant et de triste dans l'empressement de Hudson d'apparaître comme le hétéro parfait, comme l'image même de la masculinité sur laquelle on peut faire une blague de maternité et qui ose se moquer des traits efféminés de son double paysan. Le reniement de l'identité personnelle est à son paroxysme dans ce film qui, quelle ironie, a marqué longtemps la perception publique de la personne de Hudson. Mais ce n'est pas que le traitement très frileux de l'homosexualité qui donne un cachet involontairement jouissif au film. La femme-objet et la femme-victime sont en effet les attractions majeures d'un film qui s'efforce de crier son caractère progressiste à tue-tête. Dès le premier plan qui insiste sur les jambes dénudées de Doris Day, et jusqu'à la fin du long quiproquo au détriment de la femme, cette dernière ne dépasse jamais un stade drôlement enfantin. Ses affirmations en faveur d'une vie de célibataire indépendant sont ainsi vite balayées en faveur d'une soumission sans conditions au mâle. Dans ce contexte, la vitesse à laquelle Morrow succombe à la fin au charme et à l'innocence retrouvée d'Allen n'a plus rien à voir avec le stratagème de séduction minutieusement élaboré pour l'appâter au début.
Grâce à toutes ses maladresses et son discours social joyeusement embrouillé, ce film charnier d'une autre époque reste un divertissement très stimulant. Parfois, il est plus amusant d'observer les défauts parlants d'une chose imparfaite, pas réellement en accord avec son sujet, que de s'émerveiller devant une qualité lisse et politiquement correcte.

Vu le 28 avril 2006, en DVD, en VO
Revu le 16 octobre 2007, en DVD, en VO

Note de Tootpadu: