Ted

Ted
Titre original:Ted
Réalisateur:Seth MacFarlane
Sortie:Cinéma
Durée:106 minutes
Date:10 octobre 2012
Note:
Lorsqu’il avait huit ans, qu’il était mal dans sa peau et que son seul ami était un ours en peluche, Teddy, que ses parents lui avaient offert pour Noël, John Bennett a fait un vœu : que cet ami inanimé devienne réel et qu’il puisse chérir leur amitié jusqu’à la fin de ses jours. Comme par miracle, son vœu a été exaucé. Près de trente ans plus tard, alors que John sort depuis un certain temps avec sa copine Lori, la présence de Ted le maintient dans un état d’esprit puéril. Il devra alors faire un choix entre une vie d’adulte, voire dans un futur proche d’homme marié, ou la poursuite d’une existence immature avec son compagnon de longue date.

Critique de Tootpadu

Malgré une bande-annonce qui met presque exclusivement l’accent sur les aspects les plus vulgaires et enfantins de l’histoire, Ted est une comédie fort plaisante qui vise plus haut que l’entrejambe privé d’appareil génital de la peluche du titre. En effet, le premier film de Seth MacFarlane déjoue les attentes que l’on pourrait avoir à l’égard d’une intrigue basée en grande partie sur un alter ego, qui amplifie les défauts de cette génération désormais trentenaire, figée dans la quête inépuisable d’un divertissement d’adolescent. Le point crucial du scénario est de savoir si John arrive justement à franchir le pas vers l’âge adulte et à faire le deuil des frasques hilarantes de son copain de tonnerre.
Le gain de maturité passe par un itinéraire semé d’embûches, dont certaines brillent par leur originalité et leur franchise sans fausse pudeur, tandis que d’autres trahissent au contraire une trop grande fidélité envers la tradition de la comédie romantique sage et consensuelle. L’humour dévastateur du scénario se met en retrait, dès que l’histoire d’amour entre John et Lori ou la camaraderie infaillible entre John et Ted risque de faire du surplace, notamment lors de la dernière partie du film autour du personnage grotesque interprété par Giovanni Ribisi. C’est alors que la narration retombe dans le domaine de péripéties très ordinaires, à mille lieues du ton irrévérencieux qui est symptomatique de ce que notre époque – revenue de tout et incroyablement blasée – a de plus spirituel à offrir.
En même temps, le fait de s’attaquer sans vergogne aux vaches sacrées du politiquement correct, comme les juifs, les homos, et les femmes, confère au film une certaine liberté rafraîchissante, hélas pas toujours employée à bon escient. Il lui manque la force de provocation qui vient avec une méchanceté sans tabou, puisque les bons sentiments vont tout de même bon train, là où un réalisateur plus téméraire aurait sans doute opté pour une déconnade réellement sans bornes. Nous sortons donc agréablement divertis de ce film sympathique, mais certainement pas en criant au chef-d’œuvre face à une narration bien trop frileuse pour se donner les moyens pour entrer sur le terrain d’une jouissance trash.

Vu le 8 septembre 2012, au C.I.D., Deauville, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

S'il y a bien un film que j'attendais de découvrir le plus lors du festival du cinéma américain de Deauville, il s'agissait bien de loin du premier film de Seth MacFarlane. Connu à ce jour pour ses séries d'animation, "Les Griffin" et "American Dad", il réalise, participe au scénario et double son personnage principal, un ours en peluche drogué, alcoolique et éternel adolescent refoulé.

L'histoire est assez simple : John Bennett (Mark Wahlberg) lors de ses huit ans fait le vœu que son ours en peluche reçu comme cadeau à Noël prenne vie et devienne son meilleur ami. Son vœu comme par enchantement s'exauce et son ours devient planétairement connu et voit sa popularité chuter au fur et à mesure des années qui passent. Plus de trente ans après, le fait que Ted et John soient inséparables pèse et nuit à la relation amoureuse entre ce dernier et Lori (superbe Mila Kunis). Pris entre son frère d'armes Ted et son amour véritable envers Lori, John doit prendre des décisions importantes et le film peut alors commencer et devenir de loin la meilleure comédie américaine pour adultes vue depuis pratiquement une décennie.

Nous sommes bien loin des comédies américaines aseptisées et déversées sur nos grands écrans. Le personnage de Ted, anti-héros par excellence, ne pense qu'à fumer de l'herbe et à boire des bières à longueur de journée. Pourtant, son humour féroce fait de lui en plus d'être un superbe ours en peluche de 24 pouces un être attachant. Véritable reflet de son créateur Seth MacFarlane, on pourrait presque le croire étant donné que le réalisateur va à lui donner sa propre voix. Le soin apporté au scénario se ressent à chaque minute du film et chaque nouvelle scène provoque des salves de fou rire durant toute la durée du film (trop courte).

La vision de notre société nourrie au cinéma même kitsch (Flash Gordon) est touchante de sincérité. Le portrait de ces geeks de plus de trente ans, restés adolescents dans leurs habitudes et occupant des postes guère enthousiasmants comme attaché de clientèle pour une compagnie de location de voitures correspond bien au personnage de John. Le réalisateur dresse bien ici un constat d'une société américaine contemporaine et l'humour est sa plus belle arme pour faire passer son message adroitement et profondément.

Loin d'être une comédie classique, Ted est avant tout un conte pour adultes, avec non pas une sorcière comme grande méchante tel un Walt Disney, mais un père complètement taré et son obèse de fils cherchant par tous les moyens à acheter, puis enlever Ted à John. Loin de ralentir le film, cette intrigue parallèle permet au réalisateur de dresser un portrait guère flatteur de la popularité que continuent à drainer des stars déchues. Cette idée se ressent également par la présence de Sam Jones (Flash Gordon himself) et Tom Skeritt (Top gun).

Ce film égratigne tout le monde sans aucune exception mais surtout via un humour dévastateur et faisant de celui-ci une succession de scènes les plus cultes les unes des autres (mentions spéciales aux scènes de drague de Ted sur son lieu de travail, à son entretien d'embauche et surtout à son karaoke). Le succès du film tient aussi à son couple d'acteurs principaux. Mark Wahlberg et Mila Kunis sont excellents une nouvelle fois et le film leur doit beaucoup, car ils ont réussi à s'immerger totalement dans l'univers de Seth MacFarlane. Ce dernier a dû avoir bien du mal à obtenir le feu vert de la major Universal en leur donnant comme argument l'histoire d'un ours en peluche alcoolique et drogué comme personnage principal. S'appuyant sur son acteur principal, il a ainsi pu voir son projet prendre vie au plus grand bonheur du public.

Ted est donc dès sa première vision la meilleure comédie que j'ai pu découvrir depuis très longtemps au cinéma. Ce film restera très longtemps comme l'un de mes préférés cette année et au vu du succès surprise du film (plus de 200 millions de dollars sur le territoire américain), une suite semble se dessiner à l'horizon.

Vu le 8 septembre 2012, au C.I.D., Deauville, en VO

Note de Mulder: