Beaux jours (Les)

Beaux jours (Les)
Titre original:Beaux jours (Les)
Réalisateur:Marion Vernoux
Sortie:Cinéma
Durée:94 minutes
Date:19 juin 2013
Note:

La dentiste Caroline a perdu sa meilleure amie il y a cinq mois. Profondément bouleversée par ce décès, elle a pris une retraite anticipée par la suite. Ses deux filles lui ont offert un abonnement découverte au club pour retraités « Les Beaux jours », dans l’espoir que les liens sociaux que leur mère y tissera lui éviteront une dépression plus sérieuse. Caroline s’y rend à contrecœur, persuadée que les différents ateliers qui y sont proposés ne lui serviront à rien. Elle tombe pourtant sous le charme de Julien, le prof d’informatique sensiblement plus jeune qu’elle, qui ne tardera pas à la séduire.

Critique de Tootpadu

Marion Vernoux s’était absentée du cinéma pendant près de neuf ans. Cette longue parenthèse d’inactivité cinématographique, curieuse de la part d’une réalisatrice qui avait enchaîné ses cinq premiers films avec respectivement deux ou trois ans d’intervalle, n’était pas pour nous déplaire, tant son dernier film, A boire, ne nous donnait point envie d’en voir plus. Les Beaux jours reprend en quelque sorte là où l’histoire d’ivrognes nous avait laissés : face à un portrait de femme à fleur de peau, truffé de personnages qui ne savent pas vraiment ce qu’ils veulent. A la différence cruciale près que le dispositif de l’indécision constante fonctionne plus que convenablement ici, surtout grâce à l’interprétation tout en finesse de Fanny Ardant.

L’actrice s’adonne en effet corps et âme à ce rôle d’une femme en suspension, blasée par la monotonie de son quotidien, suite au coup de tête qui lui a fait tout lâcher. Contrairement à l’impression erronée que donne la bande-annonce, Caroline ne souffre pas de troubles psychologiques. Elle se trouve juste à un carrefour existentiel à partir duquel aucune des directions possibles ne la satisfait. Ce n’est ni une frustrée de la vie, ni une réservée qui attend l’amour fou sur le tard pour éclore de son œuf d’une bourgeoise, qui était jusque là une épouse et une mère sans reproche. Le cheminement du personnage n’est pas non plus celui de ces vieux à la mode en ce moment, qui entament sereinement la dernière étape de leur vie. Son état d’esprit est bien plus instable et imprévisible, comme si, à force de badiner avec l’amour et un passé qui ne l’intéresse plus, elle cherchait à combler le vide qu’elle éprouve autour d’elle.

Au manque de détermination de cette affaire amoureuse avec ou sans lendemain correspond le ton bancal du film. Or, pour une fois cette inégalité sied parfaitement aux exigences d’une intrigue mi-lucide, mi-ironique. Au lieu de s’attrister sur le sort de cette femme, qui se laisse volontairement enjôler par les belles paroles d’un séducteur pathologique, la narration garde une distance très juste à l’égard de ce couple mal assorti et pourtant animé d’une affection sincère. Il en découle un optimisme modéré, infiniment plus plaisant que le trait forcé des deux extrêmes de la farce et de la tragédie romantique. C’est précisément parce que la mise en scène de Marion Vernoux privilégie les émotions en demi-teinte aux effusions de sentiments mélodramatiques, que nous sommes ravis de retrouver chez la réalisatrice une ambiguïté intelligente des rapports entre hommes et femmes, loin des stéréotypes, comme seul le cinéma français sait les évoquer en pointillé.

 

Vu le 10 juin 2013, au Club Marbeuf

Note de Tootpadu: