Lily aime-moi

Lily aime-moi
Titre original:Lily aime-moi
Réalisateur:Maurice Dugowson
Sortie:Cinéma
Durée:103 minutes
Date:00 avril 1975
Note:

Le journaliste François est chargé par son rédacteur en chef d’écrire un article sur la vie quotidienne d’un ouvrier. Par l’intermédiaire des syndicats d’une usine, il s’adresse à Claude, un ouvrier hautement qualifié. Ce dernier ne souhaite toutefois pas raconter sa vie professionnelle, mais faire le deuil de son mariage de près de cinq ans avec sa femme Lily, qui vient de le quitter. François laisse alors de côté son travail et emmène Claude avec lui, afin d’assister à un combat de boxe, où son ami loufoque Johnny Cask subit une énième défaite. Ensemble, les trois hommes partent à la reconquête du cœur de Lily.

Critique de Tootpadu

Quel électron libre, quel talent d’acteur explosif qu’était Patrick Dewaere ! Il avait le don excessivement rare d’illuminer l’écran dès son apparition, d’attirer le regard même quand il ne faisait rien. Ce qui n’est d’ailleurs pas souvent le cas dans le premier film du réalisateur Maurice Dugowson dans lequel il campe le rôle d’un boxeur qu’on ne voit pas se battre, d’un tombeur de filles qui se prend un râteau après l’autre. Son personnage est un magnifique artiste de la vie, un optimiste né qui s’embarque dans la mission « Lily » sans trop réfléchir, par simple camaraderie ou plutôt par solidarité avec un autre perdant invétéré, qui accepte son sort avec beaucoup moins de grâce et de désinvolture.

Le problème, c’est que l’histoire de Lily aime-moi tourne essentiellement autour de Claude, avec les frasques ennuyeuses du journaliste et celles impétueuses du boxeur comme simple distraction à part. Toutefois, les déboires de ce bon bougre, interprété stoïquement par un Rufus autrement abonné aux seconds rôles, ne s’articulent pas autour de la condition ouvrière, encore bien plus d’actualité au milieu des années 1970 que de nos jours, où il faut réactualiser le symbole des bonnets rouges révolutionnaires pour créer un semblant de cohésion vers le bas de l’échelle sociale. A cause de la séparation récente, ce bonhomme assez fade oublie son boulot éreintant et court après la femme de sa vie, quitte à miauler des nuits durant devant sa fenêtre. Alors que le changement de décor, de la cité avec ses noms de rue interchangeables et de la ville avec ses fêtes mondaines chez Juliette Gréco vers la campagne et son auto-stoppeuse libertine, aurait pu fournir le prétexte pour une mise en abîme entre les conditions de vie aussi difficiles en province qu’à la capitale, le récit reste consciencieusement à l’écart de toute prise de position politique.

Il s’agit donc avant tout d’une occasion ratée d’aborder sur le ton de la comédie un emploi du temps terne, qui ne fait guère rire ceux et celles qui le subissent. A moins que le caractère très anodin des événements soit conçu exprès comme un arrière-plan inintéressant, sur lequel l’exubérance magistrale de Patrick Dewaere peut s’exprimer sans entraves. Dans ce cas, l’ambition de Maurice Dugowson est pleinement réussie, sous réserve que son acteur fétiche apparaît au mieux une demi-heure et que le reste du temps, la narration se traîne considérablement.

 

Vu le 18 novembre 2013, à la Cinémathèque Française, Salle Henri Langlois

Note de Tootpadu: