Bel Antonio (Le)

Bel Antonio (Le)
Titre original:Bel Antonio (Le)
Réalisateur:Mauro Bolognini
Sortie:Cinéma
Durée:102 minutes
Date:05 juillet 1961
Note:

Après avoir passé quelques années à Rome, où ses exploits sexuels ont beaucoup plus défrayé la chronique que son travail dans le corps diplomatique, le bel Antonio revient vivre chez ses parents en Sicile. A désormais trente ans, il ne pense pas encore à se marier, bien que ses parents lui aient déjà trouvé une épouse potentielle, Barbara Puglisi. Mais puisque Antonio ne la connaît pas, il préfère poursuivre sa vie de célibataire insouciant. Jusqu’au jour où il tombe par hasard sur une photo d’elle, qui est belle comme un ange. Le coureur de jupons invétéré ne se fait pas prier et accepte avec joie le mariage arrangé. Pourtant, la vie conjugale ne lui réussit point, à cause d’un fâcheux problème d’impuissance quand les sentiments se mêlent à la sexualité.

Critique de Tootpadu

Autrefois, pendant une période de trois décennies glorieuses, entre les années 1950 et ‘70, le cinéma italien savait parfaitement rendre compte d’une société écartelée entre la tradition catholique et l’idéal latin du macho. Les films les plus représentatifs de cet âge d’or ont réussi à traiter cette schizophrénie entre l’esprit et la chair sur le ton de la mélancolie lucide, toujours à deux doigts de la farce douce-amère. L’âme collective italienne se reflétait dans ces portraits au vitriol d’une société accablée depuis des siècles par des complexes aussi désespérants que charmants, au coloris local plus ou moins marqué selon les régions. Le Bel Antonio est de celles-là, de ces plongées fascinantes dans un état d’esprit pratiquement révolu, qui honore le cinéma italien tout en mettant en question sa façon frileuse d’aborder des sujets tabous.

La participation au scénario du trublion Pier Paolo Pasolini, alors sur le point d’entamer sa carrière de réalisateur, laisse supposer que les troubles libidineux du protagoniste auraient aisément pu être la métaphore pour une homosexualité mal vécue. Evidemment, le récit ne s’aventure jamais explicitement dans cette direction, allant au contraire jusqu’à expliquer assez lourdement les inhibitions de Antonio lors d’une séquence de confession intime à son cousin. Or, ce n’est pas qu’à cause de cette justification anémique que le centre de la problématique du scénario peine à être le point fort du film. La déchéance du personnage principal, du Don Juan désiré par toutes à la risée d’une communauté consanguine qui ne connaît qu’une seule et unique définition de la virilité, en tire certes sa raison d’être, mais c’est surtout grâce au jeu délicat de Marcello Mastroianni, un poète de l’interprétation sur ces deux tableaux opposés, qu’elle reste crédible.

Ce sont donc les éléments annexes, qui gravitent autour de la question faussement scandaleuse de l’impuissance masculine, qui nous ont davantage subjugués. La mise en scène de Mauro Bolognini, un réalisateur a priori dépourvu d’un style personnel mais assez habile pour combiner avec succès les différentes influences esthétiques contemporaines, capte en effet les envies des uns et les jalousies des autres avec une candeur éclairée, qui nous rend encore plus cher le cinéma italien de cette époque fastueuse.

 

Vu le 20 novembre 2013, à la Cinémathèque Française, Salle Henri Langlois, en VO

Note de Tootpadu: