Amour est un crime parfait (L')

Amour est un crime parfait (L')
Titre original:Amour est un crime parfait (L')
Réalisateur:Jean-Marie Larrieu, Arnaud Larrieu
Sortie:Cinéma
Durée:111 minutes
Date:15 janvier 2014
Note:

A l’université de Lausanne, la réputation du professeur de littérature Marc repose avant tout sur ses conquêtes féminines parmi ses étudiantes. La dernière proie de ce séducteur invétéré était Barbara, une jeune femme au talent prometteur qui a disparu mystérieusement. Alors que la police rôde autour de la faculté et que Richard, le directeur du département de Marc, veut à tout prix éviter le scandale, le professeur peu exemplaire fait la connaissance de Anna, la belle-mère de la disparue. Cette femme étrange lui apportera tout ce qu’il n’a jamais su trouver à travers ses aventures amoureuses sans lendemain ou sa relation intime avec sa sœur Marianne.

Critique de Tootpadu

La montagne est de retour chez les frères Larrieu, quatre ans après que leur conte apocalyptique avait procédé à une diversification des décors naturels. Or, leur topographie cinématographique s’est enrichie pour ce film d’un autre lieu emblématique, le Rolex Learning Center de l’Ecole Polytechnique de Lausanne, où l’épaisseur criminelle et psychologique de l’intrigue trouve un reflet tout en transparence. Cet espace futuriste nous invite en effet à nous y perdre. Une incitation à l’abandon des repères habituels des locaux universitaires cloisonnés et ternes d’autant plus irrésistible qu’elle constitue le prolongement logique d’une histoire elle aussi formée de courbes douces et d’un voyeurisme que sa splendeur visuelle sauve d’un malaise trop prononcé.

Une fois de plus, Mathieu Amalric campe dans L’Amour est un crime parfait une bête de sexe insatiable, une sorte de satyre qui cache derrière son air d’innocence mi-illuminée, mi-enfantine une noirceur inquiétante. L’acteur excelle toujours autant dans cet emploi peu flatteur, au point de rendre crédible le parcours guère orthodoxe de son personnage. Pour Marc, la quête du plaisir, peu importe qu’il soit de l’ordre érotique ou lié à un tabagisme effréné, prime sur tout. Elle se propage jusqu’à ses rapports très troubles avec sa propre sœur. En effet, le décor paradisiaque des montagnes enneigées d’une Suisse faussement idyllique sert d’arrière-plan à un enchaînement de mauvaises rencontres et autres manifestations de lubies malsaines, conté avec une certaine folie loufoque, avant que le dénouement bancal ne vienne gâcher quelque peu la fête.

La mise en scène des frères Larrieu a retrouvé ici son panache visuel, après une période de relâchement longue de deux, trois films. Leur admiration traditionnelle de la montagne est merveilleusement complémentée par l’aspect autrement imposant de l’architecture universitaire, alors que l’une comme l’autre ne sont que le terrain de jeu d’un esprit dangereusement perturbé. Peut-être notre degré d’identification plutôt élevé avec un protagoniste aux agissements pas très nets est-il précisément dû à cet aspect plastique édifiant, comme si pareils crimes abjects que ceux commis par Marc ne pouvaient se passer dans un contexte naturel ou artificiel si enchanteur.

 

Vu le 8 janvier 2014, à la Salle Gaumont - Louis Feuillade

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

En 1955, le maitre de l’angoisse Alfred Hitchcock nous proposait un thriller  parfaitement maîtrisé Le crime était presque parfait avec Grace Kelly et Ray Milland. Le titre du cinquième film des deux frères réalisateurs Arnaud L et Jean-Marie Larrieu aurait pu annoncer un thriller machiavélique intéressant. Ce film qui est scénarisé par les deux frères Larrieu est aussi l’adaptation d’un roman de Philippe Djian publié en 2010, Incidences. Malgré un casting intéressant et prometteur Mathieu Amalric (Marc), Karin Viard (Marianne), Maïwenn (Anna), Sara Forestier (Annie), Denis Podalydès (Richard), l’histoire reste au point mort.  Mathieu Amalric pourtant excellent comédien semble réciter son texte mécaniquement lors de deux ou trois scènes. De la même manière, la lenteur excessive du film semble orienter celui-ci vers un certain public.

Certes, on reconnaît facilement l’ambiance littéraire de Philippe Djian dont l’adaptation par Jean-Jacques Beineix en 1986 de son livre 37.2 le matin reste comme l’un des films culte de toute une génération. Cette danse perverse faisant cohabiter amour malsain et mort visuellement intéressante aurait gagné à être nettement plus musclé et moins littéraire. Un livre et un film utilisent leur propre langage. Les réalisateurs en voulant rester trop proches de la tonalité du livre Incidences ont oublié qu’un bon thriller nécessite du rythme, de la vie. A comparer à l’excellent thriller Mea culpa de Fred Cavayé, ce film possédant un casting luxueux oublie tout simplement de divertir et ne repose que sur une ambiance terne. Le cadre de Lausanne en plein hiver permet d’obtenir certes de belles scènes mais on n’adhère pas à cette ambiance.

Certains pourraient voir dans ce film le squelette sophistiqué d’un thriller brillant où le vide est synonyme d’ambiance des films des années70. Mais les frères Larrieu ne sont pas les dignes héritiers de Hitcock, ils leur manquent cette audace, cette stylisation de l’action pour faire de leur film un incontournable film de l’année. Le manque de rythme fait de leur film un édifice certes attrayant mais pourtant parfaitement vain. Les personnages ne sont que des pantins inanimés et privés de vie. Ce film est donc parfait pour une diffusion un dimanche soir sur France 2 mais décevant pour une projection payante en salles.

Vu le 24 janvier 2014 au Gaumont Champs-Elysées Ambassade, Salle 12

Note de Mulder: