Last days of summer

Last days of summer
Titre original:Last days of summer
Réalisateur:Jason Reitman
Sortie:Cinéma
Durée:111 minutes
Date:30 avril 2014
Note:

En 1987, le jeune Henry vit les derniers jours de l’été auprès de sa mère Adèle, dépressive depuis que son mari l’a quittée. Alors qu’il fait les courses avec elle, l’adolescent est abordé par Frank, un homme blessé et à l’allure menaçante, qui les oblige à l’emmener chez eux. Il s’agit d’un détenu évadé, condamné pour meurtre, qui attend le prochain train afin de quitter la région. La prise d’otage n’aurait pu durer qu’une nuit, mais Frank devient vite une figure paternelle pour Henry, ainsi qu’un nouvel amant pour sa mère.

Critique de Tootpadu

Au cinéma comme dans la vie, tout dépend du point de vue. Contée depuis la perspective d’un personnage adulte au moment des faits, cette histoire d’une prise d’otage qui se mue en nouveau départ familial aurait aisément pu sonner faux, puisque accablée de clichés romantiques. Or, Last days of summer est avant tout un récit d’adolescence, c’est-à-dire des chemins possibles qui s’ouvrent à cet âge crucial et dont il ne restera qu’un seul à sa fin. Henry n’est peut-être pas le plus intéressant des personnages, lui qui n’a pas encore vraiment dû se remettre des déceptions amères qui rythment parfois la vie. Cette innocence relative fait cependant de lui l’indicateur le plus sensible des tensions qui traversent l’intrigue. De cette dernière, il est simultanément l’observateur et le point névralgique à partir duquel la narration amorce un réseau temporel plus complexe qu’il ne paraît de prime abord.

Il aura fallu au réalisateur Jason Reitman cinq films pour atteindre un niveau de maturité appréciable. Désormais loin des enfantillages de ses débuts et du cynisme précoce qui le rapprochait dangereusement du nihilisme à la Alexander Payne, il nous présente ici une histoire qui trouve le juste équilibre entre le rêve et la réalité. La parenthèse d’un épanouissement familial idyllique qui ne dure qu’un week-end y prend la forme d’un condensé de vie. Pour les trois personnages centraux, il y a eu un avant et il y aura un après, le tout amené avec une liberté de ton qui aurait de quoi nous déconcerter dans un contexte moins harmonieux. Mais ce qu’ils ont vécu ensemble, pendant ce bref laps de temps et à l’écart d’un monde impitoyable, les marque dans la plus pure tradition romanesque.

La bonté presque caricaturale des personnages les inscrits en effet dans le registre du mélodrame, où un nombre incalculable de mauvaises choses arrive à des individus sans reproche, mais du coup durement éprouvé. Sauf que le recul et le décalage du point de vue en dédramatisent a priori les enjeux. Puisque à l’adolescence le cœur s’emballe et se brise à une vitesse vertigineuse, sans que les espoirs vite déçus laissent des séquelles permanentes, cette hypothèse d’une vie épanouie sert à Henry davantage de modèle à chérir que de souvenir mélancolique. Cette sagesse subtile se manifeste ainsi in extremis, pour clore sur une note un brin trop sucrée une histoire qui avait su nous subjuguer jusque là par sa sobriété émotionnelle.

 

Vu le 21 janvier 2014, à la Salle UGC, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

La cérémonie des Oscars aura lieu le 2 mars 2014 et l’un des grands oubliés de cet évènement est bien le nouveau film très réussi de Jason Reitman. A seulement 36 ans ce jeune réalisateur surdoué nous propose son cinquième long métrage (Thank you for smoking (2005), Juno (2007), In the air (2009), Young Adult (2012)). Il témoigne une nouvelle fois qu’il est non seulement un réalisateur à suivre de près mais également un scénariste aguerri et un très bon directeur d’acteurs. Loin de ces comédies atypiques, il nous propose ici un drame poignant sur une famille reconstituée se composant d’une mère divorcée et de son fils et d’un prisonnier en cavale. En adaptant le deuxième romain de l’écrivaine américaine Joyce Maynard ,le film permet de suivre ces trois personnages au travers de trois périodes de leur vie et repose sur l’essence de la rédemption. Nous faisons tous des erreurs dictées par notre jalousie, notre volonté de nous affirmer et de vouloir s’imposer. Le personnage de ce prisonnier échappé de prison Frank Chambers montre que cet homme est victime d’une malchance. Sa femme est morte suite à sa chute dans un escalier à cause d’une altercation violente . Le thème de la seconde chance est également important car Franck trouvera dans la maison de cette femme divorcée et de son fils une raison de retrouver l’amour et de se montrer utile. Nous sommes donc loin de ces drames hollywoodiens reposant sur des personnages pittoresques ou caricaturaux. Le film est comme une cantique dont le rythme nous rappelle à bien des égards le film Stand by me de Rob Reiner (1986) et Un monde parfait de Clint Eastwood (1993).

Je suis rarement aussi touché par la sincérité d’un réalisateur ne cherchant pas volontairement à nous émouvoir. Le réalisateur réussit à capter toute l’âme du bestseller de Joyce Maynard et par un soin des détails nous refait vivre la vie des années 80. Les affiches de film  et les jouets Star wars du jeune enfant Henry Wheeler nous permettent  de nous souvenirs de cette période où nous étions nous aussi enfant. Le personnage de Frank Chambers nous renvoie à ces héros  victimes d’une tragédie et qui essayent pourtant de montrer qu’ils peuvent racheter leur faute. Les rapports justes et affectifs qu’il entretient avec Adele et son fils Henry sont parfaitement décrits et montrent une nouvelle fois que Jason Reitman est un réalisateur chantre du cinéma indépendant. Loin du cinéma hollywoodien de son père réalisateur Ivan Reitman (SO Fantômes (1984), Evolution (2001), Sex Friends (2011).) , il préfère de loin le cinéma indépendant lui permettant ainsi de participer à la production et écrire et réaliser ses propres films.  C’est également l’un des rares réalisateurs à savoir analyser aussi bien l’âme de ses personnages. Pour cela dès son premier film Thank you for smoking (2005), il s’appuie sur le jeu de comédiens habitués à des productions importantes (Aaron Eckhart, Robert Duvall) . Dans In the Air (2009) les deux personnages principaux étaient interprétés par les excellents George Clooney, Anna Kendrick. Dan Last days, il donne ainsi à Kate Winslet (nominée aux Golden Globe 2014) et Josh Brolin l’un de leurs meilleurs rôles. Le réalisateur a compris qu’un bon film devait non seulement reposer sur un scénario complet mais également sur un casting parfait et des acteurs toujours en recherche d’améliorer leur jeu.

Last days of Summer montre donc une nouvelle fois que le cinéma se doit d’être non seulement un divertissement mais également un moyen de réflexion et surtout que c’est notre enfance qui nous permet de nous construire et de prendre telle ou telle voie. Malgré nos blessures, nous devons continuer à avancer quitte à en payer un tribut important. Le personnage principal du film est bien cet enfant de treize ans comme ce fut le cas du point de vue du livre de Joyce Maynard. Cette période pendant laquelle Frank va partager un moment de sa vie et de celle de sa mère va avoir un impact important sur le choix de son futur métier. Cette influence du père (de substitution) semble être très importante également pour le réalisateur qui comme son père a choisi le même métier. Le jeune personnage après avoir passé un cap de méfiance envers cet étranger en fuite va s’attacher comme sa mère à celui-ci. En effet, loin d’être un dangereux prisonnier, c’est avant tout un homme blessé et instruit. Un homme qui a pu se reconstruire et trouver la famille qu’il cherchait. Cette romance n’est certes pas aussi idyllique qu’elle semble l’être mais montre que des personnes blessés peuvent se retrouver. Ce message très sincère et émouvant fait toute la force de ce film. Même si la presse américaine semble n’être totalement pas convaincue , ce film est mon premier coup de cœur véritable de cette année.

Enfin, le réalisateur ne néglige en rien les seconds rôles et nous permet ainsi de retrouver avec plaisir James Van Der Beek (Dawson….), Clark Gregg (Marvel's Agents of S.H.I.E.L.D..(2013))…) et le trop rare Tobey Maguire (Spider-man (2002), Brothers (2009), Gatsby le Magnifique (2013)).

Vu le 21 janvier 2014  à la salle UGC, en VO

Note de Mulder: