Josette

Josette
Titre original:Josette
Réalisateur:Christian-Jaque
Sortie:Cinéma
Durée:91 minutes
Date:22 janvier 1937
Note:

Albert Durandal est incapable de garder un emploi. Habité par la musique, il espère un jour vivre de son art. Mais en attendant, il prend en charge la petite Josette, la fille de sa voisine Jeanne, qui doit suivre un traitement à la campagne. Alors que la fillette l’accompagne au concertina, Albert chante sur la voie publique, sans trop de succès. Jusqu’au jour où il vole au secours du baron Rothenmeyer, pris d’un malaise en pleine rue. Albert et Josette l’emmènent chez eux, pensant qu’il s’agit d’un pauvre vieux qui n’a rien mangé depuis longtemps. Pour les remercier de leur générosité, le milliardaire exauce les trois vœux de la petite fille : guérir sa mère, transformer sa peluche de caniche en véritable chien et faire d’Albert une vedette de music-hall.

Critique de Tootpadu

L’acteur Fernandel fait partie de ces monstres sacrés du cinéma français, au même titre que Bourvil, De Funès ou Gabin, qui avaient tendance à tellement se tailler leurs films sur mesure que chacun d’entre eux n’était en fait que la confirmation plus ou moins narcissique de leur emprise sur le public. Ce phénomène s’est bien sûr répété par la suite, d’abord avec Belmondo et Delon, ainsi que de nos jours sous une forme heureusement atténuée à travers des comiques au registre limité comme Dany Boon ou Franck Dubosc. Mais le recul avec lequel nous pouvons désormais jauger les vedettes du siècle dernier nous permet de mieux comprendre à quel point cette focalisation sur le talent d’un seul comédien produisait la plupart du temps des films sans grand intérêt, sauf pour les fans indécrottables et autres nostalgiques d’une France assez archaïque.

L’intrigue de Josette passe en revue les différentes facettes du personnage Fernandel, à un rythme de plus en plus déréglé et superficiel. A l’étape initiale du grand dadais, qui rêve de la célébrité mais qui reste au fond un maladroit attachant, suit celle de la consécration, où l’acteur peut faire jouer librement son charme de maître du divertissement. C’est le dernier revirement qui se montre le plus problématique puisque le protagoniste n’aura dès lors plus qu’à prouver son ascendant sur les femmes. Or, autant les pitreries de Fernandel comme chanteur bégayant peuvent encore passablement nous amuser, autant le ton de la comédie s’alourdit irrémédiablement quand cette timidité se transforme en élan romantique temporairement déçu.

La mise en scène très routinière de Christian-Jaque ne fait strictement rien pour enrayer cette dégringolade de plus en plus marquée vers un théâtre de boulevard qui ne repose alors que sur des méprises pesantes. Tandis que le népotisme affiché du film reste pardonnable, avec la fille de Fernandel qui joue à ses côtés jusqu’au dernier plan où elle a enfin le droit de le désigner comme son père, les errements xénophobes et racistes du scénario prêtent déjà beaucoup moins à rire. Hélas, la revendication nationaliste de la « France aux Français » était tout à fait dans l’air du temps des années 1930, de la même façon qu’un humour plus que douteux à l’égard du domestique africain.

Il aurait fallu une intrigue plus consistante, aux accents capraesques plus appliqués, pour nous faire oublier ces faux pas et par la même occasion célébrer véritablement le talent de Fernandel, au lieu de l’exploiter sans la moindre ingéniosité filmique.

 

Vu le 24 février 2014, à la Cinémathèque Française, Salle Georges Franju

Note de Tootpadu: