Goal of the dead

Goal of the dead
Titre original:Goal of the dead
Réalisateur: Thierry Poiraud, Benjamin Rocher
Sortie:Cinéma
Durée:138 minutes
Date:27 février 2014
Note:

Le club de foot Olympique de Paris part en province pour un match amical contre les amateurs de Caplongue. C’est une rencontre riche en symboles puisque Sam Lorit, le capitaine vieillissant de l’équipe parisienne, est originaire de cette petite ville qu’il avait quittée dix-sept ans plus tôt pour poursuivre une carrière de joueur professionnel. Le match s’annonce donc tendu, pas seulement à cause de la rancune des fans de Caplongue qui en veulent toujours à Lorit de les avoir trahis à l’époque, mais aussi parce que Jeannot, ami d’enfance du joueur vedette, s’est fait doper avec une substance toxique qui l’a transformé en bête sanguinaire.

Critique de Noodles

Goal of the Dead – 1ère mi-temps :

Depuis le succès phénoménal de la série d’horreur américaine The Walking Dead, le moins que l’on puisse dire est que les zombies ont le vent en poupe. Pourtant, c’est bien au cours des années 80 que les morts-vivants véritablement peuplé toute une frange du cinéma. Comment renouveler un genre de plus de trente ans, et qui trouve encore un large écho aujourd’hui, dans le cinéma Grindhouse de Robert Rodriguez par exemple ? Tout simplement en plaçant les zombies dans un contexte bien particulier : celui du football. Imaginez alors un film d’horreur de série B, croisé avec un match du Paris Saint-Germain. Ce cocktail osé et original a un nom : Goal of the Dead, et aussi étonnant que cela puisse paraitre, il s’agit bien d’une idée française.

C’est Benjamin Rocher qui est aux commandes du premier long métrage de Goal of the Dead, la première mi-temps. Ce jeune réalisateur a déjà eu l’occasion de se familiariser avec les films de zombie, puisqu’en 2009 il coréalise le film La Horde avec le journaliste Yannick Dahan. Dans Goal of the Dead – première mi-temps, qui constitue son premier long métrage en solo, les morts-vivants laissent place à une foule de supporters infectés par un virus semblable à la rage. La mission de Rocher est claire : dans cette première partie, son rôle est d’introduire progressivement toute la dimension fantastique, d’opérer un glissement vers l’horreur au sein d’un film qui se présente aux premiers abords comme une comédie dans la plus pure tradition du cinéma français.

Le film commence donc par nous présenter une brochette de personnages plus décalés et caricaturaux les uns que les autres : le jeune prodige du football égocentrique et prétentieux, les trois frères coréens qui ne parlent pas un mot de français, ou encore les risibles supporters d’un petit village paumé. Toutes ces figures incarnées par des acteurs souvent inconnus, au jeu très et même trop exagéré, participent à donner un caractère potache à Goal of the Dead. De plus, l’aspect comique provient également de l’opposition qui est faite entre la capitale et la province, et le film n’hésite pas à pointer du doigt et à ridiculiser l’envers du décor du sport le plus populaire de l’Hexagone.

L’arrivée de la catastrophe se déroule de manière relativement bien maitrisée. Il faut saluer le montage incisif et particulièrement efficace, qui nous permet de suivre le danger qui guette l’équipe optimiste tandis qu’elle se rapproche du lieu de la rencontre sportive. Les premières apparitions des enragés, violents à souhait, provoqueront sans doute plus d’éclats de rire dans la salle que les dialogues, qui souffrent parfois de quelques faiblesses.

Là où le film fonctionne parfaitement, c’est justement dans le gore dont le second degré pleinement assumé, et qui donne ce côté tellement jouissif à Goal of the Dead, et c’est finalement ce qu’attendent les spectateurs.

Goal of the Dead – 2nde mi-temps :

Le second et dernier volet du dyptique Goal of the Dead voit sa réalisation assurée par Thierry Poiraud. Ce dernier est, entre autres, le coréalisateur du long métrage Atomik Circus, le retour de James Bataille avec Benoit Poelvoorde et Vanessa Paradis.

Dans l’ensemble, les grandes lignes de la réalisation de Goal of the Dead – première mi-temps sont reprises ici, formant ainsi un ensemble très homogène. Certes, des différences dans le style sont bien entendu perceptibles, mais cela ne gênera en aucun cas le spectateur. En tout cas, faire débuter ce volet par un rapide résumé du précédent, narré en voix off par un personnage de supporter beauf qui apporte sa touche d’humour, est une idée comique et audacieuse.

Avec cette seconde mi-temps, le film bascule totalement dans la comédie horrifique, et les rues du paisible village de Caplongue deviennent des décors apocalyptiques où rôdent les enragés. Point positif : alors que Goal of the Dead peut prendre des allures de parodie, les monstres ne sont jamais ridiculisés. Au contraire, ils représentent toujours une menace réelle et conservent leur dimension effrayante.

Réussir un film de morts-vivants avec un budget si peu élevé constitue un véritable défi, mais ce dernier à été relevé haut la main par Thierry Poiraud. Le maquillage qui transforme les supporters en créatures contaminées n’a que très peu à envier aux films d’horreurs américains qui sont actuellement projetés dans nos salles obscures.

Les séquences les plus réussies sont très certainement celles où le film assume pleinement son exagération du gore, comme lorsque des ralentis utilisés à outrance nous permettent de savourer le spectacle jubilatoire d’un bain de sang. Toutefois, on aurait justement souhaité davantage de ce genre de scènes, et peut-être également une utilisation plus fréquente de musique techno, grâce à laquelle le film devient un véritable défouloir.

Face à tout ceci, les différentes relations entre les personnages possèdent bien moins d’intérêt et de potentiel humoristique dans cette deuxième partie. On regrette que la situation embarrassante dans laquelle se trouve Samuel Lorit, le héros du film qui découvre qu’il est le père d’une adolescente délaissée, n’offre pas plus de moments cocasses. Heureusement, le scénario réussit à ne jamais se prendre au sérieux, et ceci pour le plus grand plaisir des spectateurs.

Quant à la séquence finale, dans laquelle Sam et Idriss sont poursuivis sur le terrain par la horde d’enragés qu’ils attirent en utilisant des fumigènes, c’est très certainement la plus grande réussite visuelle du film.

Finalement, tout comme le premier volet, Goal of the Dead – seconde mi-temps atteint également ses objectifs, en offrant au public un divertissement purement jouissif. On ne peut que féliciter les deux cinéastes d’avoir pris l’initiative de présenter leur projet sous une forme si atypique, celle d’un double programme qui rappelle réellement l’esprit Grindhouse. Une expérience à ne louper sous aucun prétexte.

Vu le 27 février 2014 au cinéma Les 3 Luxembourg

Note de Noodles:

Critique de Mulder

Le cinéma d’horreur en France ne brille pas de la même étincelle que celle fédératrice qui continue à se perpétuer dans le cinéma asiatique (et Japonais) et américain. Les derniers essais tel La Horde étaient certes intéressants mais ne s’imposaient pas comme des réussites exemplaires. Dans les nombreux festivals de cinéma fantastique, il devient rare voire impossible de découvrir des œuvres françaises témoignant d’un vrai attachement envers ce genre. Le projet Goal of the Dead soit un film de plus de deux heures en deux parties chacune d’un réalisateur différent mais avec le même casting mérite d’être ovationné et défendu massivement.

Dans les années 70, les films Grindhouse auxquels Quentin Tarantino et Robert Rodriguez ont rendu hommage à travers le dyptique Planète terreur / Boulevard de la mort (2007) permettaient de découvrir deux films différents dans la même soirée reliés par des bandes annonces. Le film Goal of the Dead rend hommage à ce cinéma maintenant oublié et  juste avant sa projection  deux fausses bandes annonces aussi gores que comiques ont été présentées.

La première partie réalisée par Benjamin Rocher (co-réalisateur de la Horde) permet de découvrir les personnages principaux et les habitants de la ville de Capelongue. Impossible de ne pas penser en découvrant cette première partie aux premiers films de Peter Jackson (Brain Dead notamment), à la saga des morts vivants de George Romero mais  également à la comédie culte Shaun of the dead de Edgar Wright (2005). Il s’agit bien d’ une comédie matinée d’éléments typiques du cinéma d’horreur (médecin fou, zombies, personnage afro-américain ou européen dans le cas présent). Le cinéma d’horreur des années 70 était un cinéma à message social montrant ce que pouvait entraîner les travers de nos sociétés non respectueuses de notre environnement. Le réalisateur a parfaitement assimilé l’essence du cinéma d’horreur et malgré un budget guère élevé a pu donner une véritable  ambiance à son premier film dont le mérite lui revient entièrement. Il s’appuie ainsi sur une caricature du milieu sportif peu présent dans le cinéma de genre français mais également des médias. Le réalisateur nous propose donc sa vision des zombies et nous livre pendant soixante-dix minutes une vraie déclaration d’amour à un genre qui s’est vu être propulsé par de grands réalisateurs tels John Carpenter, Wes Craven, David Cronenberg.. Impossible de ne pas ressentir de plaisir à la vue de ce cinéma décomplexé fait par un réalisateur fan de ces réalisateurs pour un public friand de découvrir d’excellents films d’horreur malheureusement trop rares en France.

La seconde partie reprend exactement au moment où se termine l’action de GOD – première partie et change non seulement de scénaristes (Nicolas Peufaillit et  Tristan Schulmann remplacent Quoc Dang Tran, Marie Garel, , Ismaël Sy Savané et Laëtitia Trapet) mais aussi de réalisateur. Thierry Poiraud reprend donc les rênes du récit. Connu pour le moment pour le film co-écrit et co-scénarisé avec son frère Didier Atomik Circus, le retour de James Bataille, il réalise donc son premier film. Alors que la première partie était une comédie horrifique, celle-ci est un véritable thriller horrifique aussi violent que baroque. Ce réalisateur parfaitement en phase avec le premier semble avoir les même bases d’inspiration mais semble nettement plus inspiré par des films comme Assault on Precinct 13 de John Carpenter. Il laisse certes place parfois à des moments dignes d’une comédie mais nettement moins présents que dans la première moitié. Le soin  apporté aux différentes prothèses et maquillages ainsi qu’à la musique très importante dans ce genre de film estparfaitement maîtrisé. L’apothéose finale dans le stade de foot durant laquelle l’épidémie a trouvé son expansion est à saluer tellement on sent que malgré un maigre budget, toute l’équipe du film s’est mis au diapason pour nous livrer tout simplement un grand film d’horreur.

Goal of the Dead permet également de montrer l’excellente volonté du distributeur Luminor de défendre un cinéma de qualité et en le distribuant d’une manière autant convaincante qu’originale. Ainsi après plusieurs dates dans un seul cinéma de Paris, le film sera projeté dans différentes villes (Lyon, Nice, Avignon, Nantes et Audincourt).  Cette volonté de présenter autrement un film et surtout de le partager mérite d’être souligné.

Vu le 20 mars 2014 au cinéma Les 3 Luxembourg

Note de Mulder:

Critique de Tootpadu

Sans trop de regrets, nous ne sommes plus allés au Festival Fantastique de Gérardmer depuis deux ans. Or, l’ambiance particulière de ces quelques jours à l’honneur du cinéma de genre nous manque tout de même un peu. Ce film d’horreur jouissif y aurait parfaitement trouvé sa place, tant il s’inscrit dans une tradition du cinéma français, qui cherche son salut dans la surenchère des effets et dans un ton exacerbé qui fait plutôt rire que frémir de peur. Les réalisateurs Benjamin Rocher et Thierry Poiraud n’inventent certes rien à travers leur film en deux parties, mais ils actionnent les leviers des différents dispositifs éprouvés avec une efficacité qui force le respect ou qui constitue en tout cas un divertissement fort appréciable.

Goal of the dead, c’est en quelque sorte la réponse française à la formule Grindhouse de Robert Rodriguez et Quentin Tarantino. On y trouve également de fausses bandes-annonces hilarantes avant le film, qui donnent le ton de l’excès irrévérencieux qui va suivre. Et les deux volets de l’intrigue, projetés à la suite mais selon une formule d’exploitation exclusive qui accentue l’aspect événementiel de l’expérience, sont encore plus homogènes dans la forme que leurs pendants américains. Cette cohérence narrative pourrait être vue soit comme une absence de style filmique de la part des réalisateurs, soit comme un effacement de leurs velléités personnelles au profit d’un fil conducteur qui ne connaît pratiquement aucune rupture formelle notable. Tandis que la première mi-temps procède à la mise en place savoureuse des personnages avec notamment un antagonisme marqué entre les ploucs de la province et les snobs de la capitale, la deuxième mi-temps fait voler en éclats cet ordre fragile par le spectacle intense d’une lutte pour la survie sans ménagement.

Le stade de la maturité des films de zombies et autres créatures contagieuses et voraces est atteint déjà depuis quelques années. C’est grâce à des films à l’humour débridé comme celui-ci que le genre arrive néanmoins à survivre, avant d’entamer tôt ou tard son déclin. En attendant ce moment fatidique, autant prendre son pied avec des divertissements sans fausse note, qui brillent plus par leur goût pour la cruauté viscérale que par leur originalité.

 

Vu le 20 mars 2014, au 3 Luxembourg, Salle 3

Note de Tootpadu: