Kidon

Kidon
Titre original:Kidon
Réalisateur:Emmanuel Naccache
Sortie:Cinéma
Durée:101 minutes
Date:14 mai 2014
Note:

En février 2010, les médias du monde entier diffusent les images de quatre tueurs à la solde du Mossad, qui seraient responsables de la mort du responsable palestinien Al-Mabhouh à Dubaï. Le problème est que les services secrets israéliens ne sont pas au courant d’une telle mission. Une cellule de crise est immédiatement installée, qui devra élucider cette affaire étrange. Elle ne tarde pas à retrouver la trace de Daniel Lévi, un ressortissant français, et de sa bande, qui auraient éliminé le politicien à leur propre initiative. Les choses se compliquent quand un lien est établi entre ces espions amateurs et Ariel Palmoch, un ancien recruteur pour le Mossad, contraint à la retraite suite à une première tentative d’assassinat infructueuse de Al-Mabhouh.

Critique de Tootpadu

Difficile à dire ce qui nous rend le plus dubitatif avec cette coproduction franco-israélienne : le fait que la suprématie des moyens de surveillance de la part des services secrets israéliens y occupe une place si importante qu’on se croirait presque dans un film de propagande, comme les Américains aiment tant en faire pour se rassurer sur leur position au sommet de la hiérarchie mondiale, ou bien le ton très léger sur lequel le scénario s’emploie à démonter cette machine parfaitement huilée, comme si la guerre larvée qu’Israël se livre depuis des décennies avec ses voisins plus ou moins malveillants était un sujet de comédie sans la moindre gravité. Des deux côtés, nous émettons en tout cas de sérieuses réserves, face à un film qui aspire presque désespérément à être un divertissement à la Danny Ocean. Le hic, c’est que Kidon s’est choisi un arrière-fond, de surcroît inspiré d’une affaire réelle, qui impose d’emblée un minimum de sérieux. Or, la seule tâche à laquelle la mise en scène s’applique est la création de fausses pistes, multipliant à satiété les dispositifs pour berner le spectateur, sans jamais voir dans les possibles implications internationales de ce cafouillage autre chose qu’une source de moquerie folklorique, visant à la fois la France, la Russie, l’Iran et bien sûr Israël.

La narration sous forme de mise en abîme constante suit ainsi sans véritable surprise la trame que d’innombrables scénarios à l’intelligence maligne autoproclamée ont emprunté avant elle. Personne n’y est ce qu’il prétend être et chaque pièce du puzzle révèle des facettes encore plus incroyables d’une intrigue largement plus complexe qu’il ne paraissait au début. Le décor des salles d’interrogatoire et la chute finale qui renverse toutes nos certitudes renvoient évidemment au modèle Keyser Söze. Mais la méchanceté cynique de Usual suspects fait cruellement défaut à ce film, qui cherche au contraire à régler les différends respectifs sur le ton de la rigolade. Cette légèreté affirmée s’avère en fin de compte préjudiciable pour une histoire, qui aurait pu être haletante, voire habitée par une certaine pertinence politique, si seulement elle s’en était donné la peine.

Il ne nous reste donc que la belle gueule – et les « petites fesses » – de Tomer Sisley pour nous consoler. Ce qui est tout de même un peu maigre de la part d’un film, qui donne trop l’impression de vouloir désamorcer les conflits au Proche-Orient par le biais d’une comédie sans substance. Une telle entreprise était vouée à l’échec, aussi parce que la situation actuelle en Israël est beaucoup trop épineuse et brûlante pour en faire un simple divertissement singé sur le modèle américain.

 

Vu le 16 mai 2014, au MK2 Bibliothèque, Salle 7, en VO

Note de Tootpadu: