Lucy

Lucy
Titre original:Lucy
Réalisateur:Luc Besson
Sortie:Cinéma
Durée:89 minutes
Date:06 août 2014
Note:

Lucy, une étudiante étrangère à Taiwan, est piégée par Richard, un coursier louche avec lequel elle sort depuis une semaine seulement. Elle devra remettre une petite valise au contenu inconnu à Mr. Jang, le caïd de la mafia coréenne. La transaction tourne au bain de sang. Contre son gré, Lucy devra alors faire le mulet en dissimulant dans ses entrailles une pochette contenant une nouvelle drogue synthétique. Par accident, son corps absorbe la moitié de la cargaison dangereuse. Le cerveau de Lucy accroîtra alors rapidement sa puissance, jusqu’à faire d’elle un ennemi redoutable du crime organisé.

Critique de Tootpadu

La prémisse était des plus alléchantes : il suffirait d’un petit coup de pouce du destin pour faire d’une femme plutôt ordinaire un véritable super-héros, d’abord omniscient et puis pratiquement omniprésent. Le phénomène qui se répète à l’infini dans le genre commercial à la mode, où des êtres fantastiques aux pouvoirs insoupçonnés s’affrontent pour sauver le monde, serait alors à la portée de tout le monde. Car tout un chacun disposerait en fait du potentiel intellectuel de dépasser l’humble condition dans laquelle nos gènes, notre éducation et notre civilisation respectifs nous enferment. Que pareille hypothèse repose sur des pieds d’argile scientifiques et qu’elle se nourrit une fois de plus d’une absorption fort douteuse de drogues ne paraît guère préoccuper Luc Besson. Le réalisateur et scénariste la prend au contraire comme prétexte pour un spectacle étonnamment vigoureux, qui sait juste suffisamment faire abstraction des travers habituels du patron de EuropaCorp. pour rester un divertissement efficace.

Les premiers indices de la lourdeur formelle du réalisateur ne mettent ainsi pas longtemps avant d’arriver. Les renvois au règne animal afin de souligner le dilemme pernicieux dans lequel se trouve d’emblée le personnage principal nous indiquent très tôt la voie bassement explicite que la narration prendra par la suite. Ils sont les signes avant-coureurs d’un état d’esprit assez simpliste, qui continuera à miner les ambitions du fond scénaristiques. Aussi exquise la montée en puissance des capacités de Lucy soit-elle, elle se voit régulièrement ramenée à un niveau plus banal, infecté des clichés folkloriques que Luc Besson affectionne. Le cachet international de l’action, entre l’Asie et l’Europe, avec un petit détour par l’Amérique, ne sert qu’à colporter les mêmes poncifs qui plombent généralement les autres productions du studio de Saint-Denis. Or, cette façon de brasser le plus large possible devient carrément risible, quand la mise en scène s’inspire maladroitement du maître Kubrick, lors d’un voyage spatio-temporel qui est censé corroborer les découvertes existentielles de l’héroïne.

Néanmoins, il subsiste juste assez de l’essence de ce formidable sujet pour nous faire pousser des ailes à la sortie de la salle de cinéma. Malgré ses défauts narratifs notables, Lucy suggère que les obstacles, réels ou imaginaires, ne devraient jamais enfreindre notre soif de connaissance. En cela, la morale de l’intrigue rattrape même un peu de son sérieux en matière de médecine cérébrale, puisque ce n’est guère le nombre de nos neurones qui nous rend plus intelligents, mais la variété et la vivacité des connections entre eux. Ce n’est point le regard vide de Scarlett Johansson – apparemment abonnée ces jours-ci aux rôles de femmes mutantes et distantes –, qui nous a donc réconciliés avec ce film inégal, mais sa facilité à véhiculer une idée abstraite par le biais d’un coup de poing cinématographique sans états d’âme.

 

Vu le 3 septembre 2014, à l’UGC Ciné Cité Bercy, Salle 31, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Luc Besson est et reste de loin mon réalisateur français préféré capable de me faire trembler sur mon fauteuil, d’être ému à la scène suivante pour enfin me faire rire par une scène anecdotique. C’est également l’un des rares réalisateurs français à dépasser le cadre de notre paysage cinématographique local pour conquérir un marché international. 

En seize films sur pratiquement trente et un ans (1981-2014), il a pu imposer sa marque de fabrique sur le thriller (Subway (1985), Nikita (1990), Léon (1994)), redonner ses lettres de noblesse à la mer (Le grand bleu (1988), Atlantis (1991)), créer une saga familiale Arthur et les Minimoys (2006-2010), s’approprier la comédie en la dynamitant (Angel-A (2005), Malavita (2013)) et rénover les fresques historiques (Jeanne d'Arc (1999) et The lady (2011)). Pourtant, le genre auquel il semble le plus attaché est bien le film de science-fiction. Déjà en 1997, il imposait son film le Cinquième Elément comme la riposte française aux blockbusters américains. Certes il répondait via ce film en faisant sa propre mécanique de guerre (effets spéciaux spectaculaires, Bruce Willis Ian Holm, Gary Oldman et Chris Tucker dans les rôles principaux).

Les derniers films de Luc Besson en qualité de réalisateur n’ont pas été  d’imposants succès comme ce fut le cas du Cinquième Elément (264 millions au box-office mondial). Certes avec le temps, ce grand réalisateur s’est assagi en nous proposant des films plus familiaux, plus dociles mais cette atténuation n’a guère été appréciée par son fidèle public. Lucy marque donc après de nombreuses années les retrouvailles d’un réalisateur maîtrisant plusieurs genres avec son public.

Il est très difficile de donner une catégorie cinématographique à ce film car il s’apparente plus à un hommage à l’évolution humaine, à une reconnaissance en la religion et surtout à notre existence. Lucy est la symbiose parfaite du thriller futuriste, du film d'action. C’est une très belle déclaration au septième Art. Comme pour chacun de ses films, Luc Besson est ici scénariste, réalisateur et co-producteur. Il est ainsi totalement libre de faire le film qu’il veut avec un budget digne d’une grosse production européenne. Il créé ainsi de nouveau un personnage féminin fort, Lucy, simple jeune étudiante étrangère qui suite à l’absorption d’une drogue va se transformer peu à peu en une super héroïne capable d’utiliser l’immensité de ses capacité intellectuelles alors qu’un être humaine n’en utilise que 10%. Luc Besson fait ainsi de son film non seulement un film intelligent sur le devenir de l’homme mais surtout un film hommage aux œuvres qui ont marqué ce réalisateur. Ce n’est donc pas un pur hasard de retrouver Scarlett Johansson entre deux Avengers en super héroïne  dans l’un de ces meilleurs rôles. A la fois femme fragile et femme invulnérable elle fait de son personnage un symbole de l’indépendance féminine aussi à l’aise à donner la vie qu’à l’enlever.. Les nombreuses scènes d’action du film montrent  que Scarlett Johansson a acquis par ses choix filmographiques l’épaisseur de jeu qui lui manquait au début de sa carrière. Le réalisateur Luc Besson a toujours su magnifier dans ses films la gente féminine et ce film en est une fois de plus la preuve.

Loin de ces films d’action, ces thrillers sans profondeur, le réalisateur n’oublie pas que le cinéma doit sans cesse être renouvelé et repensé. Que cela soit par ces scènes animalières et le piège dans lequel Lucy s’enfonce de plus en plus, que cela soit dans des scènes d’action digne de la trilogie Matrix ou d’un message philosophique très perceptible dérivé du film 2001 l’odyssée de l’espace de Stanley Kubrick ( 1968), le réalisateur survole l’avancée d’un cinéma intelligent et donne à son film une réelle attraction.

Alors que le studio de cinéma Europacorp nous avait habitué à nous livre soit des films d’auteur Haute tension (2003), Ne le dis à personne (2006), Un balcon sur la mer (2010), La Marche (2013) ou des films d’action très efficaces (Saga Le transporteur, Taken, Colombiana (2011)..), Lucy réussit le mixte des deux. Il s‘impose comme un des meilleurs films de ce studio et de Luc Besson depuis trop longtemps. Ces retrouvailles s’accompagnent non seulement d’une critique plutôt positive mais surtout d’un succès véritable aussi bien aux Etats-Unis (le film a été rentabilisé dès son week-end  de sortie) et en France où les salles bretonnes et parisiennes sont remplies. On attend donc avec impatience son prochain film et on espère fort qu’il sera de la même originalité et qualité que Lucy .

Lucy
Un film écrit et réalisé par Luc Besson
Produit par Virginie Besson-Silla
Avec Scarlett Johansson, Morgan Freeman
Musique d’Éric Serra
Directeur de la photographie : Thierry Arbogast
Montage : Julien Rey
Production companies : EuropaCorp, TF1 Films Production, Canal+, Ciné+, TF1
Distribution : EuropaCorp Distribution (France and Benelux), Universal Pictures (International)
Date de sortie : 25 Juillet 2014 (Etats-Unis), 6 août 2014 (France)
Durée : 89 minutes

Vu le 08 août 2014 au Gaumont Opéra Capucines, Salle 01, en version originale

Note de Mulder: