Recettes du bonheur (Les)

Recettes du bonheur (Les)
Titre original:Recettes du bonheur (Les)
Réalisateur:Lasse Hallström
Sortie:Cinéma
Durée:123 minutes
Date:10 septembre 2014
Note:

Hassan Kadam et sa famille, autrefois les fiers propriétaires d’un restaurant en Inde, ont dû se réfugier d’abord en Angleterre, puis en France. Echoués près du village de Saint-Antonin suite à une panne de camionnette, ils décident de s’y installer et d’y ouvrir leur nouveau restaurant. Le seul souci : juste en face se trouve déjà le restaurant de Madame Mallory, dédié à la cuisine française gastronomique et étoilé au guide Michelin. Tandis que le père de Hassan fait tout pour imposer ses goûts exotiques dans ce coin de province très préservé, le jeune chef garde un esprit ouvert à l’égard des recettes traditionnelles de son pays d’adoption, ainsi qu’à celui de Marguerite, la sous-chef dans le restaurant concurrent.

Critique de Tootpadu

En France, on ne plaisante pas avec la haute cuisine. Pas davantage d’ailleurs qu’avec les droits de l’homme. Derrière ces deux affirmations qui célèbrent un idéal maintes fois colporté se cache hélas une réalité toute autre, qui se reflète soit dans la progression sournoise de la malbouffe, soit dans un intégrisme de différentes vocations, plus nauséabondes les unes que les autres. Le cinéma français a parfaitement conscience de cet écart sérieux entre le rêve et la réalité, ce qui pourrait expliquer pourquoi ce sont les cinéastes étrangers qui parlent le plus souvent – quoique pas nécessairement le mieux – de notre gourmandise nationale, connue dans le monde entier. Ainsi, les participants français à ce conte de fée sirupeux à souhait se comptent sur les doigts d’une main (Charlotte Le Bon, Michel Blanc, Clément Sibony et Vincent Elbaz), au profit d’une distribution et d’un point de vue narratif qui privilégient à outrance les clichés les plus indigestes.

La France, telle qu’elle est représentée dans Les Recettes du bonheur s’apparente plus à un pavillon risiblement folklorique du parc à thème Epcot en Floride qu’à une vision moderne et lucide d’un pays pas vraiment au meilleur de sa forme en ce moment. Cette vision biaisée dont Walt Disney était jadis le garant est désormais perpétuée par Steven Spielberg et Oprah Winfrey, deux poids lourds de la machine hollywoodienne qui officient ici en tant que producteurs. Leur responsabilité n’est donc pas forcément d’avoir commis autant de séquences empreintes d’un parfum désagréablement rétrograde, mais plutôt de n’avoir pas su ou voulu intervenir pour mettre la barre plus haut qu’une simple carte postale atrocement consensuelle. Au lieu de nous faire saliver, les ralentis récurrents de la préparation des mets a priori succulents nous ont fait réfléchir sur la lourdeur de ce dispositif, que nous sommes les premiers à décrier lorsqu’il survient dans le cadre d’un film de guerre ou d’action.

Enfin, si nous boudons autant notre plaisir, c’est aussi parce que nous savons pertinemment que la nourriture au cinéma peut fonctionner comme vecteur de compréhension et de tolérance sincères entre les hommes par l’intermédiaire des personnages, contrairement à cette histoire assez laborieuse et jamais surprenante. Cette dernière a la fâcheuse tendance à patauger d’un poncif à l’autre, de la balade en vélo au bord d’un cours d’eau pittoresque à une fête du 14 juillet en grande pompe, en passant par les traits de caractère pour le moins caricaturaux de cette famille déracinée et de leurs adversaires qui se transformeront comme par miracle presque tous en bienfaiteurs.

Tout cela n’est certes pas très grave ou préjudiciable à une perception touristique de la France. On aurait néanmoins apprécié plus de naturel et de désinvolture enjouée, au lieu d’une trame narrative si artificielle, que l’on finit par se demander si ces deux restaurants ne coexistent en fin de compte, l’un en face de l’autre, que par l’intervention d’effets spéciaux moyennement habiles. Il s’agit là d’une question sans doute bénigne. Elle témoigne pourtant de la facture trop soigneusement préfabriquée d’un film, qui prétend promouvoir un retour aux sources en guise de solution passe-partout aux travers de la vie.

 

Vu le 6 septembre 2014, au Morny, Salle 2, Deauville, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Si on devait noter un film sur la force de celui-ci à nous donner envie de goûter les différents mets présenter, alors le nouveau film de Lasse Hallström obtiendrait à ne pas douter une excellente notation. Loin des plats indiens proposés dans le film culte Indiana Jones et le Temple maudit (1984) (Steven Spielberg est ici l’un des trois producteurs), la cuisine préparée par Hassan Kadam et sa famille est un véritable enchantement et apporte au film un véritable cachet. Après les triomphes de Slumdog Millionaire (2008), L'Odyssée de Pi (2012), Les Recettes du bonheur donne de nouveau une part importante à la culture indienne à travers un regard occidental.

Le scénariste Steven Knight en adaptant le best-seller de Richard C. Morais permet au réalisateur Lasse Hallström après le film Chocolat (2001) de livrer l’un de ses meilleurs films. Certes ce que le film perd en originalité, on reste dans le cadre d’une simple comédie dramatique académique, le film le gagne en nous présentant des personnages attachants. Loin des films américains présentant la France de manière caricaturale, le film nous propose une histoire profondément humaine et pluriculturelle. Produit par les studios Dreamworks Pictures et ayant comme producteurs notammnt Oprah Winfrey, le film nous présente un casting international. On retrouve ainsi Helen Mirren, Manish Dayal, Amit Shah, Om Puri mais également des comédiens français dont Charlotte Le Bon (dans son meilleur film) et Michel Blanc.

La thématique de la restauration semble de nouveau intéresser les studios américains. Ainsi à Deauville fut présenté non seulement ce film mais également le très réussi #Chef. Ces deux films abordent cette thématique avec un regard différent mais démontre bien que le public reste attaché aussi bien à ce qu’ on lui présente au cinéma comme à table des mets de qualité.

Lasse Hallström s’avère être ici le réalisateur parfait pour nous livrer un film sur le choc des cultures comme cela a déjà été le cas dans le film Des saumons dans le désert (107mns). Voir ses deux restaurants se retrouvant par un hasard malencontreux l’un en face de l’autre s’affronter épice le film de scènes aussi drôles que dramatiques. Ce film réussit donc le pari de nous émouvoir, de nous faire saliver mais également de nous faire rire par des situations irrésistibles. C’est évident qu’après ce film, vous ne verrez plus une simple omelette de la même manière.

Vu le 02 septembre 2014 à la Salle Metropolitan, en VO

Note de Mulder: