Things people do

Things people do
Titre original:Things people do
Réalisateur:Saar Klein
Sortie:Cinéma
Durée:110 minutes
Date:18 février 2015
Note:

Bill Scanlon a perdu son emploi d’assureur. Il n’en dit rien ni à sa femme, ni à ses deux fils. Bientôt, il est dans l’impossibilité de payer le crédit pris pour construire une piscine dans le jardin de sa maison. Plongé dans le désespoir le plus profond, Bill pense au suicide. Presque par hasard, il bascule dans l’illégalité en commettant des vols à main armée. Au bowling, il fait la connaissance de Frank McTiernan, un inspecteur de police qui ne s’est toujours pas remis de l’échec de son mariage. Les deux hommes deviennent amis, mais Bill ne fait pas assez confiance à Frank pour lui avouer ses activités criminelles.

Critique de Tootpadu

Les films sur des perdants, qui restent jusqu’au bout fidèles à leur état d’esprit défaitiste, nous ont toujours été sympathiques. Cet intérêt pour les causes perdues ne s’explique pas par des penchants sadiques – enfin, on l’espère – mais par notre volonté rarement démentie de voir malmenés autant que possible les vieux schémas soumis à la fin heureuse ou moralisante. Les faibles et autres bons à rien sont tellement méprisés dans notre ère gouvernée par des super-héros et des célébrités de pacotille que tout film qui s’y intéresse sans s’amadouer sur leur sort mérite d’emblée notre attention. La première réalisation de Saar Klein, jusqu’à présent le monteur de Terrence Malick et de Cameron Crowe, entre autres, a de surcroît l’avantage de ne jamais chercher à simplifier les tourments éthiques de son personnage principal.

Pour faire court, Bill Scanlon se plante sur toute la ligne. Avant le début du film, il était un assureur trop honnête et généreux avec ses clients, d’où son licenciement sans appel. Puis, il remplit moyennement son rôle de père de famille et de mari, humilié sans cesse par son beau-père et pas assez proche de sa femme pour oser partager avec elle sa situation préoccupante. Afin de s’y soustraire, il quémande pitoyablement auprès de son ancien employeur, bien sûr sans succès. Déjà résigné à finir comme le chien à qui il a donné le coup de grâce en plein désert, Bill paraît avoir plus de chance avec son premier vol à l’improviste. Sauf que cette séquence plutôt hilarante est introduite par d’autres indices de l’impuissance quasiment grotesque de cet homme qui veut bien faire, mais qui se vautre chaque fois lamentablement. Enfin, tous ses casses ne font nullement de lui un hors-la-loi emblématique, mais juste un pauvre gars qui a trop de scrupules pour rompre courageusement avec l’image peu flatteuse qu’il a de lui-même.

Ces scrupules-là, a priori honorables, vont finir par lui pourrir même son regain de respectabilité, acquis in extremis. Tandis que l’on peut juger cette dernière partie du scénario la moins crédible, elle reste pourtant cohérente dans sa réticence à succomber à une fin épanouie, même avec une piscine remplie de cailloux. Car au fond, Things people do est une étude de caractère fascinante, parsemée de quelques échappées de méditation guère pesantes – l’influence de Terrence Malick oblige. Que cet homme se dérobe à tout attachement simpliste de la part du spectateur, en dépit de ses innombrables maladresses, nous le devons à l’interprétation assez distante de Wes Bentley. Son décalage permanent avec le monde qui l’entoure, aussi favorable soit-il à son état démuni, provient ainsi d’une certaine froideur détachée du comédien, qui trouve ici son rôle le plus consistant depuis très longtemps.

 

Vu le 8 septembre 2014, au Casino, Deauville, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Comme chaque année le festival du cinéma américain de Deauville nous aura permis de découvrir de nouveaux réalisateurs  comme celui du film Things people do, Saar Klein. Ancien monteur notamment pour les films La Ligne rouge (1998), La mémoire dans la peau (2009), il signe ici son premier scénario en même temps sa première réalisation. En plaçant son personnage principal dans notre contexte économique, il montre ainsi que chacun d’entre nous peut être amené à bafouer la loi et tomber dans l’illégalité. De nombreux films ont déjà présenté ce sujet comme Braqueurs amateurs dans lequel le personnage incarné par Jim Carrey était obligé de faire des hold up pour survivre suite à un licenciement. Pourtant, on aurait tendance à préférer nettement ce film indépendant car loin d’être une comédie, c‘est un drame poignant et réaliste que nous sert le réalisateur.
 
L’ancien métier de Saar Klein lui permet de construire un film fort et poignant se déroulant dans un cadre atypique. Il dresse surtout une vision très pessimiste de notre société actuelle gangrénée par les excès d’un capitalisme nauséabond. Dans un tel contexte, l’amitié entre cet inspecteur de police ,  Frank McTiernan (Jason Isaacs, parfait) et notre personnage principal Bill Scanlon (Wes Bentley) montre deux visions de notre monde actuel dans lequel même un criminel malgré lui et un policier peuvent avoir des valeurs communes.
 
Une nouvelle fois, le cinéma indépendant se révèle être l’endroit parfait pour donner à un brillant comédien cantonné à des seconds rôles, Wes Bentley enfin son premier rôle (Frères du désert (2002), Hunger games (2012), Interstellar (2014). Surtout, il montre que la liberté artistique permet de donner naissance à de grands réalisateurs en devenir. Dans une mouvance proche du cinéma prôné par Terrence Malick, Saarr Klein se révèle être un élève très doué dont on est certain de  réentendre parler prochainement..
 
Vu le 07 septembre  2014 au C.I.D., Deauville, en VO

Note de Mulder: