Jamie Marks is dead

Jamie Marks is dead
Titre original:Jamie Marks is dead
Réalisateur:Carter Smith
Sortie:Cinéma
Durée:101 minutes
Date:00 2014
Note:

Jamie Marks est mort. Personne ou presque ne s’émeut de la disparition de ce garçon solitaire, souvent en proie aux brimades de ses camarades de classe. Seuls Gracie, qui avait découvert le corps sans vie, et Adam, un sportif sensible à la souffrance de Jamie, viennent se recueillir sur les lieux du drame. Une relation amoureuse pourrait naître de leur rencontre, sauf que Gracie se sent harcelée par le fantôme du défunt qui rôde autour de sa maison. Adam le voit aussi et finit par accepter de l’aider dans sa quête d’outre-tombe.

Critique de Tootpadu

Chaque année, au moins un film s’égare à Deauville, qui aurait aussi bien sa place au festival fantastique de Gérardmer. Cette fois-ci, il s’agit de Jamie Marks is dead, une drôle d’histoire d’amour qui joue avec les conventions du genre sans jamais complètement les transcender. La délicatesse avec laquelle le film explore un sujet a priori trop tortueux pour nous toucher est pour beaucoup dans sa réussite. Contrairement à la série Twilight et ses imitations encore plus risibles, le deuxième film de Carter Smith ne prend pas le volet romantique de l’intrigue comme prétexte pour toute une panoplie d’affrontements lourds en effets spéciaux. Il se positionne plutôt du côté de l’ambiguïté des sentiments, voire d’une dépendance difficile à assumer. Jamie et Adam ne sont pas les représentants fiers d’un couple gay hautement atypique, mais les prisonniers d’une obsession qui craint de dire son nom.

Les symboles équivoques sont en effet légion au sein d’un récit, qui brouille les pistes sans pour autant se voiler la face. Dès la première séquence, la seule où l’on voit Jamie de son vivant, maltraité dans les toilettes du vestiaire, l’empathie d’Adam est palpable. Cet adolescent appartient autant au monde des sportifs intégrés qu’à celui des exclus, par la couleur rousse de ses cheveux et surtout par une sensibilité qui le fait plus hésiter que foncer. D’une certaine façon, la seule justification scénaristique pour l’intrigue annexe de la mère, victime d’un accident qui l’amène à lier amitié avec son agresseur, une femme aussi impuissante qu’elle, serait de rendre son caractère angélique un peu moins aimable. Et les rapports sexuels maladroits qu’il entreprend avec Gracie servent moins à semer le doute quant à son orientation sexuelle qu’à dresser le portrait d’un personnage assez passif. Du coup, il est une proie facile pour les avances larvées de Jamie, sans doute trop timide pour aborder auparavant l’objet de tous ses fantasmes.

Alors que le parti pris narratif de procéder à un mélange étroit entre le monde des morts et des vivants, où les actions des uns ont des répercussions sur les autres et inversement, a de quoi laisser perplexe, il peut s’expliquer par une volonté d’abolir les règles établies par rapport à la frontière infranchissable entre ces deux univers. Puisqu’il n’y a plus de repères rigides pour encadrer cette histoire sensuelle, la voie est désormais libre pour une parabole subtile sur la difficulté d’être homosexuel en tant qu’adolescent dans un contexte provincial. L’étrange y prévaut sur des éléments crus ou inquiétants, tout comme un quelconque propos engagé y est impitoyablement supplanté par l’avancement à tâtons d’une relation qui fuit comme la peste toute récupération idéologique. Est-ce que Jamie et Adam s’aiment ? Qui sait, mais d’emblée la prémisse de l’intrigue ne leur permettra pas de s’épanouir. En tout cas, leur périple serait des plus saisissants, s’il n’y avait pas cette fâcheuse ressemblance entre Jamie et Harry Potter !

 

Vu le 10 septembre 2014, au C.I.D., Deauville, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Le réalisateur Carter Smith signe avec Jamie Marks est mort son deuxième long-métrage. Après avoir commencé sa carrière comme photographe de mode (GQ, W magazine et Vogue) et réalisateur de publicités commerciales pour notamment Tommy Hilfiger et Lancôme il décide de passer à la réalisation d’un court métrage horrifique (Bugcrush (2006)) avant de réaliser en 2008 Les Ruines.  Pour son second film, Jamie Marks est mort, il adapte le roman de Christopher Barzak, One for Sorrow, publié en 2007. De nouveau, il s’agit d’un film fantastique reposant sur un jeune collégien hanté par la présence d’un étudiant mort Jamie Marks. 
 
On sent réellement la volonté du réalisateur et scénariste de s’éloigner du simple film fantastique pour dresser le portrait d’une jeunesse déprimée et repliée sur elle-même. Tout en rendant d’une manière sûrement inattendue au magicien Harry Potter (il est impossible en voyant le personnage de Jamie Marks avec sa bonhommie, ses lunettes et sa cicatrice de ne pas y penser),  le réalisateur semble peiner à trouver un rythme réel à son film. Pourtant, nous suivons avec intérêt cette enquête menée par Adam et Jamie afin de connaître l’assassin de ce dernier. Cette enquête guère captivante laisse pourtant planer l’ombre d’une production ambitieuse mais manquant cruellement de moyens financiers.
 
Le film s’apparente donc plus à une volonté scénaristique de mettre en place une atmosphère très pessimiste au demeurant qu’à s’attarder à développer une réelle intrigue. Reste une mise en scène attrayante et  une interprétation convaincante mais cela ne justifie pas l’urgence de découvrir ce film nettement moins réussi que Les Ruines, premier film de ce réalisateur.
 
Vu le 10 septembre 2014 au C.I.D., Deauville, en VO

Note de Mulder: