Get on up

Get on up
Titre original:Get on up
Réalisateur:Tate Taylor
Sortie:Cinéma
Durée:139 minutes
Date:24 septembre 2014
Note:

Séparé dès son plus jeune âge de sa mère, élevé par son père coléreux qui a fini par le laisser à sa tante Honey, James Brown n’a pas eu une enfance facile. C’est en prison, où il purge une longue peine pour avoir volé un costard, qu’il se découvre une passion pour la musique. Il fait ses premières pas sur scène avec le groupe Famous Flames, avant de devenir une institution de la musique américaine : le parrain de la soul.

Critique de Tootpadu

La chose que les Américains aiment encore plus que les icônes de leur culture populaire, de John Wayne à Michael Jackson, en passant par Elvis Presley et Marilyn Monroe, c’est de leur ériger un monument cinématographique. Très à la mode à une époque aussi lointaine que les années 1930 et ‘40, le genre de la biographie filmique vit depuis un certain temps une renaissance poussive. Rien que depuis le début de cette décennie-ci, nous avons vu passer sur les écrans de cinéma la vie parfois partielle de Serge Gainsbourg, John Lennon, Margaret Thatcher, Claude François, Nelson Mandela et Yves Saint Laurent, parmi d’autres. Même s’il reste toujours une panoplie de célébrités plus ou moins marquantes à immortaliser en film de fiction, le potentiel d’originalité s’épuise rapidement. Quitte à tortiller les conventions narratives, en agençant par exemple l’ordre chronologique selon une logique plus ou moins élaborée, l’objectif d’évoquer l’essence d’une vie reste immuable. Cette contrainte peut représenter les qualités ou les défauts d’un film, selon l’intérêt intrinsèque et forcément subjectif de la vie contée.

La biographie de James Brown est à première vue assez riche et variée pour en faire un film au moins divertissant. L’enfance malheureuse, la consécration au prix d’une rupture avec ses compagnons de route, les femmes, la drogue, les hauts et les bas d’une carrière en dents de scie : il y a de quoi concocter une intrigue rocambolesque, qui aurait de surcroît le mérite de faire passer à l’arrière-plan de la mémoire la dernière période de sa vie et cette image un peu caricaturale d’une vedette haute en couleur. L’approche du réalisateur Tate Taylor y trouve une matière suffisante pour une certaine originalité. Les transitions entre les différentes séquences s’effectuent régulièrement à l’aide de l’interpellation directe du spectateur. Ce dispositif artificiel aurait facilement pu nous déconcerter, s’il ne correspondait pas si bien à la nature même de James Brown, une bête de scène pas avare en coups de colère et autres extravagances.

Enfin, comme souvent dans ce genre de film, son sort dépend étroitement de l’interprétation centrale. Get on up vibre ainsi au rythme endiablé du jeu de Chadwick Boseman, un jeune acteur plein de promesses avec lequel le public français fait connaissance ici, faute d’une distribution adéquate en dehors des Etats-Unis de son premier grand rôle dans 42 de Brian Helgeland. Aussi éculée cette comparaison soit-elle, il n’y a aucune formule plus simple que d’écrire que James Brown, c’est lui. Grâce à sa prestation remarquable et un rythme narratif plutôt enlevé, cette biographie filmique évite largement les poncifs habituellement associés au genre.

 

Vu le 12 septembre 2014, au Morny, Salle 2, Deauville, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Après un premier film réussi et reçu aussi bien par le public que la critique, le réalisateur Tate Taylor nous livre pour son second film un biopic remarquable sur l’un des plus grands musiciens de notre époque. En s’appuyant sur le scénario de John-Henry et Jez Butterworth (La dernièr légion (2007), Fair Game (2010)), son film pourrait s’apparenter au rêve de l’artiste qui à la lisière de sa mort revoit les moments forts de sa vie. De sa naissance un 3 mai 1933 à sa mort le 25 décembre 2006, le réalisateur nous livre le portrait d’un musicien hors norme issu d’un milieu défavorisé, ayant subi des abus sexuels, ayant fait de la prison et étant devenu le parrain de la soul.
 
On reconnaît une nouvelle fois tout le talent de conteur de Tate Taylor qui revisite avec un plaisir communicatif l’histoire d’un homme qui a défendu pendant longtemps la cause des afro-américains et qui à force de travailler a réussi à devenir l’un des plus grands artistes de son époque. Les nombreux passages musicaux nous donnent clairement envie d’écouter de nouveau cet artiste ayant enregistré des morceaux légendaires (Papa's Got A Brand New Bag (1965), Sex Machine (1975)..). Loin de vouloir dresser un portrait d’un homme parfait, le film s’attache avec une rare franchise à nous livrer l’artiste tel qu’il était dans sa vie.
 
Pour donner vie à un tel personnage, il fallait trouver un comédien aussi à l’aise dans les numéros chantés et dansés que dans les moments les plus intimistes. Chadwick Boseman, apparu dans de nombreuses séries (Urgences, Person Unknowwn, Castle, Justified…) et comme acteur principal du film 42 de Brian Helgeland (2013) se révèle être parfait à tout point de vue. Il délivre une exceptionnelle performance et s’efface totalement pour laisser place à James Brown.  On sent à chaque instant que le comédien  s’est documenté en profondeur pour capter tous les petits détails de l’artiste. Avec ce rôle, il a toutes ses chances d’être nominé lors de la prochaine cérémonie des Oscar et s’affirme comme un comédien à suivre de près (son prochain film Black Panther fera d lui tout simplement une star mondiale à ne pas douter).
 
Comme ce fut le cas avec son précédent film, La Couleur des sentiments, le réalisateur semble très engagé dans sa défense des droits de la population afro-américaine. Ce sentiment se ressent au travers de nombreuses scènes notamment celle du concert donné par Mr Dynamite après la mort de Martin Luther King. Get on up découvert lors du festival de Deauville en septembre dernier mérite d’être redécouvert dès le 27 janvier prochain lors de sa sortie en vidéo.
 
Vu le 12 septembre 2014, au Morny, Salle 2, Deauville, en VO

Note de Mulder: