Riot club (The)

Riot club (The)
Titre original:Riot club (The)
Réalisateur:Lone Scherfig
Sortie:Cinéma
Durée:108 minutes
Date:31 décembre 2014
Note:

Depuis des siècles, le Riot Club est le cercle le plus secret et prestigieux de l’université d’Oxford. Ses membres s’adonnent en toute impunité à la débauche et à l’excès, surtout lors du dîner annuel de l’association. Alors qu’une nouvelle année universitaire commence, il manque deux membres au Riot Club pour pouvoir continuer d’exister. Le choix des anciens se porte sur Miles et Alistair, des étudiants en première année, qui sont prêts à tout pour être admis au club.

Critique de Tootpadu

La classe populaire anglaise pourra toujours compter sur Ken Loach pour défendre sa cause au cinéma. A l’autre extrémité du spectre social, les réalisateurs ne se bousculent pas au portillon afin de promouvoir le style de vie aisé de la haute société. Dans le cas de ce film, adapté d’une pièce de théâtre, il aura même fallu un regard étranger, en la personne de la réalisatrice danoise Lone Scherfig, pour conter cet aspect encore plus élitiste du monde des riches et des privilégiés que sont les sociétés secrètes. Or, le propos de The Riot Club paraît se résumer au simple constat que ces groupes sélectifs de l’ombre auraient pratiquement carte blanche pour faire ce qu’ils veulent, puisqu’ils jouissent d’une impunité légale inhérente à leur rang social. En effet, la morale, si chère à la classe moyenne, n’entre pas en ligne de compte lorsqu’il s’agit, pour ces jeunes gens d’ores et déjà génétiquement prédestinés à devenir des snobs insupportables, de s’affirmer dans le cercle très fermé de leur club vénéré.

Le scénario ne montre guère d’initiative pour approfondir les enjeux de ce vide de conscience, qui constitue une école dangereuse de la vie pour la dizaine de personnages au cœur du récit. Il y a certes la vague rivalité entre Miles et Alistair, avec leurs motivations diamétralement opposées pour devenir membre du club et leur façon plus ou moins brutale de s’y imposer par la suite. Mais dans l’ensemble, il manque une voix forte, soit pour, soit contre cette tradition archaïque, qui donnerait du piment à l’intrigue. A moins que la finalité inavouée de cette dernière soit précisément de démontrer à quel point la vieille aristocratie fortunée ne fait plus rêver dans notre époque de la célébrité et de la richesse factices. Si l’un des symptômes de cette grave crise d’identité était la surenchère dans l’écart de conduite gratuit, il y aurait éventuellement matière à réflexion dans cette histoire de fils de bonne famille pourris jusqu’à l’os. Sauf qu’il est plus qu’incertain que la narration ait le souffle et la profondeur requis pour atteindre pareille subtilité d’approche.

Car notre principale réserve à l’égard de ce film, dont tous les revirements importants sont hélas une fois de plus révélés sans ménagement dans la bande-annonce, est la mise en scène faussement enjouée de Lone Scherfig. Incapable de choisir une esthétique ou un cadrage pertinent, elle adopte un point de vue sans panache, qui s’efforce presque à nous garder volontairement à l’écart de ces personnages exclusivement séduisants par les privilèges dont ils jouissent dès leur naissance. La jalousie naturelle que leur statut et leur comportement peuvent nous inspirer ne se traduit à aucun moment par une mise en abîme plus viscérale de cet univers de cancres gâtés, qui seront pourtant toujours les premiers. De ce dilemme moral et narratif, la réalisatrice ne sait tirer qu’une histoire assez bancale, avare en surprises et surtout attachée à confirmer indirectement un statu quo figé, qui se fait encore plus ressentir chez nos voisins d’outre-Manche, au système de classes plus marqué qu’en France.

 

Vu le 10 décembre 2014, au Royal Monceau, en VO

Note de Tootpadu: