Hungry Hearts

Hungry Hearts
Titre original:Hungry Hearts
Réalisateur:Saverio Costanzo
Sortie:Cinéma
Durée:113 minutes
Date:25 février 2015
Note:

Jude est Américain, Mina Italienne. Ils se rencontrent à New York, tombent fous amoureux et se marient. Lorsque Mina tombe enceinte, une nouvelle vie s’offre à eux. Mais l’arrivée du bébé bouleverse leur relation. Mina, persuadée que son enfant est unique, le protège de façon obsessionnelle du monde extérieur. Jude, par amour, respecte sa position jusqu’à ce qu’il comprenne que Mina commence à perdre contact avec la réalité.

Critique de Balrog

Hungry hearts est le quatrième long métrage de Saverio Costenzo. Après avoir réalisé « La solitude des nombres premiers » sorti sur nos écrans en 2010, le réalisateur italien adapte au cinéma le roman « Il bambino indaco » de Marco Franzoso. Ce récit dramatique se déroule au cœur de New York. Jude est américain et Mina est italienne. Ils se rencontrent, tombent amoureux et de leur union naît un petit garçon. L’arrivé de ce dernier bouleverse le quotidien du couple. Mina protège son enfant de manière obsessionnelle jusqu’à en perdre le sens de la réalité. Elle évite la contamination du monde extérieur et opte pour une approche alimentaire drastique. Jude respecte la position de Mina mais craint pour la santé de leur enfant et prend conscience du danger qui le guette.

À la différence du roman qui situe l’action en Italie, l’histoire du film se déroule au cœur de New York. Ce n’est pas un choix laissé au hasard. New York symbolise à la fois l’attractivité et un climat de dureté. Costenzo a choisi cette ville car elle semble illustrer parfaitement cet antagonisme au même titre que les deux personnages principaux s’aiment malgré des différences évidentes. Les quelques minutes filmées en plan extérieure justifient ainsi un choix géographique aussi radicale. Néanmoins, les séquences extérieures ne suffisent pas à prouver quoi que ce soit tout comme le film se confond dans une présentation stéréotypée et attendue des personnages. Le film expose ces deux personnages confrontés dans l’adversité mais ne surprend pas le spectateur par des artifices scénaristiques trompeurs. Ce qui aurait été plus judicieux. Avec un tel sujet, on espère se perdre au milieu d’un conflit dont l’aboutissant serait d’apporter une réflexion sur la nature des personnages et d’accorder du crédit sur la légitimité de leurs actions respectives. Mais le réalisateur distingue le bien du mal par un arbitrage trop complaisant. Le sujet du film offre un potentiel attractif et mérite qu’on s’y attarde car il est peu souvent développé au cinéma. Le réalisateur emprunte plus d’un style pour raconter cette histoire. Hungry hearts passe du drame sociale au thriller en passant par des séquences proches d’un cinéma d’horreur, ce qui n’est pas déplaisant pour dépeindre les différents phases du film. Cependant, l’équilibre du film est tangible et un sentiment d’errance se fait ressentir. Le film peine à conserver une unité et un rythme.

En revanche, la distribution du film repose sur un choix solide et les acteurs jouent avec une justesse à fleur de peau. L’intensité du film repose sur une interprétation éprouvée. Les émotions de Mina et Jude apportent au film une véritable consistance. Les deux acteurs principaux font preuve d’une grande maturité qui cimente une mise scène bancale. Adam Driver et Alba Rohrwacher sont si profondément investis dans ce récit tragique que leur personnage respectif entraîne le spectateur au-delà du cinéma réaliste. Leurs expressivités sont maîtrisées. Le personnage de mina se montre effacé et perdu. Alba Rohrwacher transporte parfaitement le personnage de Mina qui crée très rapidement une prison affective dont elle ignore les conséquences. Le personnage de Jude (Adam Driver) donne la réplique à Mina avec un tel sentiment d'authenticité que le spectateur pourrait croire à un autoportrait tant l'acteur est convaincant. Adam Driver possède un véritable talent pour incarner celui qui, au cœur du film, reflète à la fois la force tranquille et la fragilité d'un être soumis par les délires obsessionnels de sa partenaire. Adam Driver et Alba Rohrwacher ont reçus respectivement le prix de la meilleure interprétation masculine et le prix de la meilleure interprétation féminine à la "Mostra de Venise 2014". Leurs récompenses sont amplement méritées.

Hungry hearts est porté par une ambiance introspective et par un jeu d’acteurs exceptionnel. L’interprétation d’Adam Driver et d’Alba Rohrwacher est poussée au paroxysme. Malgré une mise en scène fluctuante, un parti-pris abscond du genre et un manque à gagner de percer plus loin dans le caractère obsessionnel de Mina, Hungry hearts parvient à retenir une certaine attention sur un sujet qui mérite plus de véhémence.

Vu le 02 février 2015 au Club Marbeuf en VO

Note de Balrog: