Sinister 2

Sinister 2 est terriblement angoissant, envoutant et efficace et ne laisse aux spectateurs aucun moment de répit. Pourtant, il faut reconnaitre la plupart du temps les suites de thrillers horrifiques ne se contentent que de reproduire une formule à succès sans chercher nullement à innover. On pourra ainsi citer La Revanche de Freddy (1985), House 2 : La Deuxième Histoire (1987) ou plus récemment Hostel, chapitre II (2005). Le souci récurrent provoquant une certaine déception est la baisse de soin apportée à l’écriture du scénario et à une mise en scène guère inventive. Sinister 2 bénéfice quant à lui du même duo de scénaristes (Scott Derrickson laissant sa place de réalisateur mais gardant celle de co-scénariste et également producteur et C. Robert Cargill) et de la mise en scène soignée d’un réalisateur aguerri au genre Ciarán Foy. L’ambiance du premier film est ainsi parfaitement sauvegardée et les nombreux rebondissements mèneront la vie dure non seulement à cette jeune mère et à ses deux enfants mais aussi aux spectateurs pris dans un engrenage infernal.

Le premier volet finissait par la mort d’un romancier Ellison Oswalt et de sa famille par l’un de leurs deux enfants envoûtés par cette créature maléfique qu’est le Bughuul. Le jeune adjoint au shérif, So & So,qui avait aidé cet auteur n’avait pu éviter cet assassinat qui venait compléter une triste liste de familles tuées par l’un de leurs enfants. L’action du second film reprend quelques temps après les faits du premier volet. Ce shérif adjoint a été licencié de son poste pour incompatibilité avec son supérieur et avait décidé de continuer à enquêter et lutter contre cette force maléfique. Une de ces enquêtes l’emmène dans une maison ayant été également le lieu de l’assassinat terrible d’une autre famille et cataloguée comme abandonnée. Pourtant, dans celle-ci vit une jeune mère en fuite et ses deux enfants contre son mari violent qui les martyrisaient. Le grand soin apporté au scénario se ressent dans la profondeur des personnages sans négliger pour autant une intrigue complexe. Loin de ces films complètement tournés en found fountage qui ont fait le succès de la société de production Blumhouse (saga Paranormal Activity (2009-2015), The Gallows (2015)), Sinister 2 recourt à plusieurs reprises à plusieurs formats vidéo (Super 8, 16mm) pour illustrer les différents assassinats de famille montrés de force à l’un des deux enfants du film. Les scénaristes ont parfaitement assimilés ce qui peut créer une véritable peur chez leur public. Non seulement on retrouve ainsi les enfants sous le joug de Bughuul mais également le concept de maison hantée astucieusement utilisé dans le film.

En changeant de cadre et de déplacement le lieu principal d’une lotissement de banlieue à une ferme abandonnée près d’immenses champs de maïs, les scénaristes renforcent le côté claustrophobique du film et le réalisateur livre ainsi une peinture guère réjouissante d’une Amérique profonde dont les forces de l’ordre sont corrompues et ne se soucient guère de faire régner l’ordre. Le réalisateur Ciarán Foy dès son premier film qu’il avait scénarisé et réalisé, Citadel avait déjà mis en avant le thème d’enfants maléfiques et de lieux inquiétants. Sa collaboration avec les deux scénaristes trouve ainsi une prolongation parfaitement orchestrée. La peur engendrée par la richesse du scénario et une mise en scène parfaitement ciselée est omniprésente et préfère être psychologique que viscérale. En cela également Sinister 2 n’est pas qu’une simple suite surfant sur le succès mondial du premier volet, il apporte également ses propres éléments. On en apprendra ainsi plus sur le démon et sur son pouvoir envers les enfants qu’il a enlevés. Ce Boogeyman rejoint ainsi par son traitement convainquant le bestiaire composé de Jason Voorhes, Michael Myers, Freddy Krueger et autres Jigsaw.

Impossible également en suivant cette jeune mère persécutée avec ses deux enfants et cet ex-shérif venu les aider à lutter contre une force dépassant l’entendement à l’influence de certains films du genre tel Les démons du maïs (1984), Le village des damnés (1960) et plus généralement aux écrits de Stephen King. Le thème cher à cet écrivain de présenter une réalité tangible qui se retrouvera confrontée à une force surnaturelle (esprits, fantômes, démons) est perceptible tout au long du récit. Très éloigné du courant horrifique actuel dans lequel l’afflux de sang vient remplacer l’absence de toute évolution scénaristique, Sinister 2 préfère revenir à l’ambiance des films des années 70-80. Cet aspect est également renforcé par la présence d’une interprétation solide comme le fut les sagas telles que La malédiction (1976), les premiers Halloween (1978-). L’absence du comédien Ethan Hawke parfait dans son rôle d’un écrivain dépassé par les événements ne se fait pas ressentir grâce à la présence de la comédienne Shannyn Sossamon (Chevalier (2001), Petits suicides entre amis (2005), The Day (2011)). Elle donne par son jeu convaincant dans un rôle clé toute la force de ce film. De la même manière les deux jeunes comédiens qui sont de véritables frères jumeaux sont en parfaite alchimie et font preuve d’une belle aisance pour un premier film.

Sinister 2 par sa thématique de montrer des vidéos horribles provoquant des agissements tout aussi malfaisants renvoie de nouveau à l’influence des films d’horreurs sur un public guère habitué. Nombreux sont ceux qui ont été marqués, faits des cauchemars en regardant des films horrifiques pendant leur enfance. Certains films comme Dead zone ont marqué toute une génération de spectateurs par son climat inquiétant et envoûtant. Les films d’horreur certes sont une source de contrariété pour un public guère habitué à l’effroi. Même si de nos jours la violence est devenue habituelle dans de nombreux films, rares sont ceux qui font sursauter les spectateurs sur leur fauteuil et pourront les amener à faire des cauchemars. Dans ce sens Sinister 2 est une belle réussite, un film porté par un scénario subtil, une interprétation solide et un jeune réalisateur à suivre de près. On ne peut donc que vous encourager à découvrir ce film en salles. Le seul petit regret est l’absence d’une petite scène post générique qui aurait pu nous faire penser à une suite (ce que l’on espère).

Vu le 18 août 2015 au Gaumont Disney Village, Salle 05, en VF

Note de Mulder: