Jamais entre amis

Jamais entre amis
Titre original:Jamais entre amis
Réalisateur:Leslye Headland
Sortie:Cinéma
Durée:101 minutes
Date:09 septembre 2015
Note:

Jake et Lainey ont perdu ensemble leur virginité sur un coup de tête à l'université. Quand ils se recroisent 12 ans plus tard à New York, ils réalisent tous les deux qu'ils sont devenus des champions de l’infidélité. Prêts à tout pour trouver des solutions à leur problème, ils s'engagent dans une relation platonique sans tabous afin de s'entraider dans leur quête du véritable amour.

Critique de Mulder

En 1989, lorsque le film de Rob Reiner Quand Harry rencontre Sally sortit sur les écrans les critiques furent unanimes et saluèrent non seulement le scénario très convaincant de Nora Ephron, l’interprétation solide des deux comédiens Meg Ryan et Billy Crystal et la réalisation brillante de Rob Reiner. Ce film était le reflet des mœurs dans les années 80 et avait réussi à capter toute la sensibilité des relations hommes / femmes. Vingt-six ans plus tard, le second film de Leslye Headland (Bachelorette (2012)) s’apparente à son prolongement et à une nouvelle étude sociologique des relations sentimentales actuelles. Coproduit,scénarisé et réalisé par cette jeune réalisatrice le film n’a certes pas la même patine que le chef-d’œuvre de Ron Reiner cité ci-dessus mais a un réel charme et une vraie sincérité .

Les deux personnages principaux se sont rencontrés pour la première fois à l’université et ont perdu ensemble leur virginité. Des années plus tard, un heureux hasard veut qu’après s’être perdus de vue ils se retrouvent lors d’une réunion de personnages ayant des difficultés sentimentales. Jake est un coureur de jupons invétérés qui ne peut s’empêcher de rester infidèle et souhaite vivre pleinement sa sexualité lors de nombreuses rencontres. Lainey quant à elle ressent une attirance maladive pour un gynécologique en couple et n’arrive pas à l’oublier. Loin de ces comédies américaines traditionnelles mettant en scène une famille américaine et ses déboires, le film nous livre plutôt le portrait de deux personnes aux comportements complexes. De la même manière que l’écriture permet à certains écrivains d’exorciser leurs démons, Jamais entre amis est un film très personnel pour la réalisatrice et scénariste Leslye Headland. Très impliquée dans ce projet, Lainey s’apparente au reflet de la réalisatrice et cela se ressent aux travers de nombreuses scènes et de nombreux dialogues.

La comédienne Alison Brie est l’élément central du film. Son personnage dresse un portrait contemporain de la femme des années 2000 comme fut Sally pour les années 80. Cherchant à trouver sa place dans la société, Lainey, une professeure, semble vouloir prendre un certain plaisir à s’humilier quitte à passer pour une femme sans valeur morale lors d’un repas dans un restaurant avec son amant. Pour camper un tel personnage, il fallait une jeune comédienne capable de faire passer par son regard, sa manière de bouger toute l’ambiguïté de cette femme. Brie Allison qui fut révélée notamment par son rôle récurrent de Annie Edison dans la série Community et dans de nombreux rôles secondaires au cinéma (Scream 4 (2011), Cinq ans de réflexion (2012) trouve avec ce film son premier rôle. Elle se révèle en symétrie avec son personnage et lui apporte toute la complexité requise. De la même manière, le comédien Jason sudekis qui comme de nombreux comédiens comiques a commencé sa carrière au sein de Saturday Night live (2003-2012) et a connu de nombreux succès au cinéma (Comment tuer son boss ? (2011), Les Miller, une famille en herbe (2013)),il trouve enfin un rôle plus complexe lui permettant de mettre en valeur une plus large étendue de son jeu de comédien. La réalisatrice réussit à créer une parfaite alchimie entre ces deux personnages et les comédiens. Les nombreux dialogues qui jalonnent le film certes ont tendance par moment à ralentir son rythme mais lui donne aussi toute sa force.

Jamais entre amis s’inscrit ainsi dans la continuité des comédies de mœurs plus adultes telles No strings attached (2011) , Friends with benefits (2011) et Friends with kids (2012). Il aborde ainsi la thématique de l’amitié entre les hommes et les femmes, la recherche du bonheur et surtout la volonté de corriger ses défauts pour devenir meilleur. Dans ce sens Jake et Lainey qui sont des champions de l’infidélité vont finalement s’attacher l’un à l’autre de manière surprenante, se nourrir mutuellement et tenter de revoir leur opinion sur la fidélité.

La jeune réalisatrice réussit le pari de nous proposer un mixte réussi entre un film d'auteur indépendant et une comédie romantique adulte. On est donc loin de ces comédies interchangeables américaines, on rit, on est ému et on quitte avec regret ces deux personnages complexes et attachants avec lesquels nous avons fait un bout de route. Loin de ces personnages traditionnels omniprésents dans les comédies romantiques actuelles, les deux personnages principaux apportent un certain renouveau au genre. Le film réussit à retrouver tout le charme des grandes comédies à l’ancienne tels les films Haute pègre (1932) et Train de luxe 1934)) par un savant dosage de moments comiques, romantiques et dramatiques. Cette volonté de revenir à l’essence de la comédie pure se ressent également dans la manière de la réalisatrice de nous présenter la ville de New York sous un autre jour. Il se ressent aussi par la présence de certaines scènes surprenantes telle cette formation donnée par Jake à Lainey en utilisant pour une démo une bouteille ou cette scène d’anniversaire ou ces deux personnages arrivent hébétés sous l’effet de certaines substances. Ce sont ces scènes qui donnent au film un certain grain de folie et rendent celui-ci intéressant et si différent des comédies romantiques actuelles formatées.

Vu le 18 août 2015 au Club 13, en VO

Note de Mulder: