Experimenter

Stanley Milgram fut l’un des psychologues les plus importants du vingtième siècle dont les travaux ont non seulement marqués nos mémoires mais également offusqués un certain nombre de personnes. Son analyse de la soumission à l’autorité qu’il a pu établir par de nombreux tests psychologiques ont permis de mieux comprendre notre manière d’agir et de se comporter face à une hiérarchie. Le film débute donc par la fameuse expérience de Milgram dans laquelle un individu croit administrer des décharges électriques à un autre en cas de mauvaise réponse à un questionnaire. Dans les années soixante cette manière scientifique de tester la réaction de personnes face à une demande sentencieuse fut décriée et amena de nombreuses interrogations sur les actes immoraux exercés par certains pendant la seconde guerre mondiale. Stanley Milgram continua ses recherches par la suite en développant une idée de Frigyes Karinthy reposant sur la théorie des six degrés de séparation. Le film Experimenter revient donc sur ses recherches et nous livre une réflexion intéressante sur notre manière d’agir en société. Le traitement de l’histoire se révèle également aussi audacieux en faisant que le personnage principal s’adresse aux spectateurs. Cette intéraction qui aurait pu ralentir voire casser le rythme du film au contraire cela lui apporte une véritable identité.

Michael Almereyda réalisateur, scénariste, co-producteur de son film s’était déjà distingué par ses précédents films tel Hamlet (2000) et Anarchy (2014). Cantonné à un cinéma indépendant lui laissant une réelle indépendance créative, chacun de ses films est une réelle expérience. Cherchant constamment à amener les spectateurs à la réflexion sur son environnement, il trouve dans la biographie de Stanley Milgram la substance nécessaire pour soutenir des idées qui lui tiennent à cœur. Si The experimenter est réussi c’est que son scénario ne cherche pas uniquement à suivre les travaux de ce psychologue mais également de comprendre réellement la manière de penser et d’agir de celui-ci. La fascination que le réalisateur a envers le livre Soumission à l’autorité se ressent pleinement dans la véracité de la mise en scène et sur un choix judicieux de mettre constamment en parallèle les recherches de celui-ci et sa vie sentimentale. On retrouve ainsi dans les deux rôles principaux les comédiens Peter Sarsgaard (Night and day (2010)) et Winona Ryder (Black Swan (2011)) mais aussi le temps de quelques scènes Anthony Edwards (série Urgences), Dennis Haysbert (série 24 heures chrono), John Leguizamo (Ultimate Game (2009)), Anton Yelchin (Star Trek (2009)).

Experimenter adopte par sa forme le même élan d’interactivité que celui voulu par Stanley Milgram. La mise en scène inventive (projections sur écrans, successions de décors visibles, effets de distanciation et actions envers la caméra) sied parfaitement au film et lui confère un charme résolument rétro . Michael Almereyda réussit donc à rendre crédible et attachant un personnage complexe et torturé et dévoué à son métier quitte à laisser en second plan sa famille. L’interprétation très convaincante de Peter Sarsgaard est également une des raisons de notre attachement envers ce film

Vu le 7 septembre 2015 au CID, Deauville, en VO

Note de Mulder: