Pont des espions (Le)

Pont des espions (Le)
Titre original:Pont des espions (Le)
Réalisateur:Steven Spielberg
Sortie:Cinéma
Durée:132 minutes
Date:02 décembre 2015
Note:

James Donovan, un avocat de Brooklyn se retrouve plongé au cœur de la guerre froide lorsque la CIA l’envoie accomplir une mission presque impossible : négocier la libération du pilote d’un avion espion américain U-2 qui a été capturé.

Critique de Mulder

Aux victimes du 13 novembre

Le nouveau film de Steven Spielberg s’ancre dans une période de crainte en plein début de la Guerre froide. Dans celle-ci le peuple américain vit sous la crainte d’une attaque soviétique à chaque minute et la CIA et le FBI passent une grande partie de leur temps à la recherche d’espions soviétiques dormants. Le véritable sujet de ce film tient donc à l’idée de patriotisme américain et ce qu’un homme simple est capable de faire comme grande action pour aller jusqu’au bout de son combat. Dans ce sens, l’histoire vraie de James Donovan résonne encore comme un vibrant hommage aux valeurs américaines, à ces hommes prêts à aller jusqu’au bout de leur mission y compris en risquant leur vie pour leur nation. James Donovan a réellement existé (interprété ici par Tom Hanks), avocat spécialisé dans les assurances, il se fait remarquer par le gouvernement américain. Celui-ci lui demande dans un premier temps de défendre dans une procès perdu d’avance un supposé espion russe (aucune preuve concrète a été retrouvée contre lui hormis son passé). Cet avocat guère habitué à défendre un tel dossier va se plonger totalement dans celui-ci et s’attacher à la défense de cet homme incriminé. Leur attachement mutuel basé sur des valeurs communes est un plaidoyer vibrant pour la paix et amènera ces deux hommes à se retrouver en Allemagne pour échanger ce prisonnier contre deux ressortissants américains retenus prisonniers. De cette histoire pourtant assez simpliste, Steven Spielberg en a fait un film passionnant. Très attaché aux détails et bénéficiant d’un scénario luxueux écrit par les frères Coen Joel et Ethan sur la base d’un premier script écrit par Matt Charman, Steven Spielberg révèle une fois de plus à quel point il est un véritable virtuose du point de vue de la mise en scène.

On sent par le grand soin mis en œuvre sur la mise en scène que la collaboration entre les frères Coen et Steven Spielberg a été une source d’inspiration conséquente. Ce n’est pas non plus un hasard de retrouver dans le rôle principal Tom Hanks. Steven Spielberg a toujours privilégié son travail avec des comédiens qu’il apprécie tout au long de sa riche et longue carrière que cela soit Harrison Ford (saga Indiana Jones), Richard Dreyfuss et Tom Hanks dont ce film marque leur quatrième collaboration (Il faut sauver le soldat Ryan (1998), Arrête-moi si tu peux (2002) et Le Terminal (2004)). Ce film permet également au réalisateur de travailler avec des comédiens aguerris tels Mark Rylance, Amy Ryan, Sebastian Koch, Alan Alda. Steven Spielberg a toujours su s’entourer de comédiens solides et en adéquation avec les personnages à interpréter.

Habitués à réaliser des blockbusters (dont il est principalement le créateur du concept avec Les dents de la mer (1975)), ce grand réalisateur a toujours su trouver des projets personnels d’envergure moins grande comme ce film pour laisser libre court à sa passion véritable de créer des univers réalistes. Ainsi, le film comprend deux parties distinctes. La première se passe aux Etats Unis et nous présente de manière convaincante et avec une certaine ironie la société américaine avec ses principes bons et mauvais puis la seconde par opposition nous présente un Berlin alors que la mise en place du mur commence à s’élever. C’est le personnage campé par Tom Hanks qui fait le lien entre ces deux univers et qui montre bien la différence entre une société avec des règles prédéfinies et ancrées (les Etats-Unis) et un régime hostile et dangereux en pleine reconstruction (l’Allemagne). Steven Spielberg a déjà abordé dans ses films précédents la seconde guerre mondiale, cette fois ci il s’attache à la période qui suit. Très attaché au réalisme, Steven Spielberg a tenu à filmer aussi bien en décor naturel aussi bien Allemagne et notamment sur le pont de Glienicke. C’est en Pologne (Wroc?aw) que les scènes se passant à Berlin Est ont été filmées.

Cette année 2015 a ainsi pu redonner une véritable ampleur au film d’espionnage que cela soit à travers une comédie brillante (Spy), un film d’action impressionnant (Mission: Impossible - Rogue Nation), un pastiche réussi des films des années 70 (Agents très spéciaux - Code U.N.C.L.E) et bien entendu par le nouvel épisode de l’espion britannique le plus connu au monde. Dans ce contexte, Le pont des espions s’apparente également par son rythme et sa réalisation aux films des années 70 portés par de grands comédiens. Dans la continuité des ces précédents films Steven Spielberg témoigne une fois de plus sa volonté de livrer des œuvres fortes portant en triomphe le patriotisme américain et surtout témoignant qu’un simple américain peut devenir un véritable héros national à force de courage, de respect et d’une volonté à faire triompher la justice.

A travers le regard d’un pays personnalité parfaitement par ces deux scènes pratiquement identiques se déroulant dans un bus, on voit que le regard que porte la société envers cet avocat passé d’ennemi de la nation pour avoir défendu un espion russe à héros national pour avoir sauver la vie de deux américains prisonniers est bien celui également d’un grand réalisateur américain toujours capable de nous étonner, de nous impressionner. En cela son film n’est pas qu’un hommage aux grands réalisateurs des années 70 mais surtout le témoignage d’un réalisateur surdoué qui a su capter en plus de quarante ans de carrière l’évolution du cinéma. Le pont des espions est donc rien de moins qu’un nouveau chef d’œuvre du plus grand réalisateur hollywoodien qui ne cessera jamais de bercer notre imaginaire.

Vu le 13 novembre 2015 au Club de l’Etoile, en VO

Note de Mulder: