Legend

Legend
Titre original:Legend
Réalisateur:Brian Helgeland
Sortie:Cinéma
Durée:131 minutes
Date:20 janvier 2016
Note:

Londres, les années 60. Les jumeaux Reggie et Ronnie Kray, célèbres gangsters du Royaume-Uni, règnent en maîtres sur la capitale anglaise. À la tête d’une mafia impitoyable, leur influence paraît sans limites. Pourtant, lorsque la femme de Reggie incite son mari à s’éloigner du business, la chute des frères Kray semble inévitable…

Critique de Mulder

Legend est un thriller d'une noirceur absolue marquée par la présence de Tom Hardy dans un double rôle hallucinant de gangsters dignes descendants d’Al Capone. En pratiquement dix-sept ans, Brian Helgeland n’aura scénarisé et réalisé que cinq films dont on retiendra particulièrement Payback (1998) Chevalier (2001) et 42 (2013)). C’est plutôt dans sa qualité de scénariste très courtisé par Hollywood qu’il a pu s’imposer comme l’un des plus brillants. Il aura ainsi pu collaborer avec les plus grands réalisateurs actuels que sont Richard Donner, Kevin Costner, Curtis Hanson, Clint Eastwood, Tony Scott, Ridley Scott et Paul Greengrass. Aussi à l’aise à mettre en place les éléments d’un thriller, d’un film d’action ou d’un drame, son nouveau film pourrait ainsi apparaître comme une synthèse d’un réalisateur doué pour diriger des comédiens mais préférant livrer des œuvres intimes et réalistes plutôt que des blockbusters décérébrés.

En s’inspirant de personnages existants, les frères jumeaux Kray, Brian Helgeland trouve le juste équilibre pour redonner vie au Londres des années 60. Ces deux plus célèbres gangsters des années 60 avaient pratiquement toute la ville à leurs pieds. En faisant régler la violence et la corruption dans les endroits les plus appréciés de la ville, ils avaient réussi à devenir pratiquement intouchables. De nombreux écrits ont relaté leurs méfaits devenus légendaires. Véritables symboles de la pop culture déviante, Brian Helgeland a trouvé suffisamment de matière dans la biographie écrite par John Pearson pour élaborer un script foisonnant de détails. Cette quête livre un film dans la grande tradition d’un cinéma d’auteur tel Il était une fois en Amérique (1984) de Sergio Leone. La grande difficulté du réalisateur et scénariste était non seulement de rendre crédible cette reconstitution historique mais surtout de trouver un comédien ayant une étoffe de jeu suffisamment importante pour interpréter les deux frères Kray. Dans ce sens Tom Hardy s’impose aisément comme le choix parfait. Sa filmographie témoigne qu’il a réussi à s’imposer non seulement dans des films d’action tels Bronson (2008), Warrior (2011), The Dark Knight Rises (2012) mais aussi à créer de véritables personnages. Sa présence dans le film lui confère une plus-value réelle. De la scène de combats dans un pub londonien à des règlements de comptes divers, il donne aux deux frères Kray vie de manière convaincante. Chacun des deux frères a sa propre gestuelle, sa propre déviance et surtout une attitude propre à régler ses comptes.

Le réalisateur s’est également entouré d’un casting intéressant avec Emily Browning dans le rôle de la compagne de Reginald Kray (Frances Shea) et dans le rôle de l’agent de police incorruptible Christopher Eccleston s’impose comme étant un excellent choix. De nouveau le soin apporté dans l’écriture du scénario se ressent aussi au niveau de l’image et le réalisateur et scénariste apporte une certaine épaisseur aux rapports entre les deux frères, leur mère et Frances Shea. Ces relations faites d’amour et de haire seront les armes amenant à la perte de repères de ces deux frères. Loin du personnage de Bane plutôt invulnérable, les deux frères ont leurs propres blessures et semblent marqués par un funeste sort inévitable. Toute la force du film Legend revient ainsi à étudier deux personnages fascinants liés l’un à l’autre et prêts à tout pour mettre Londres à leurs pieds.

Le biopic que constitue ce film n’est pas qu’un moyen une nouvelle fois de permettre à Tom Hardy de montrer qu’il est l’un des plus doués comédiens de sa génération mais surtout de redonner vie aux grandes fresques de truands que le cinéma nous a donné. On pense inévitablement à la saga du Parrain, à Scarface (1983) et à d’autres films reposant non seulement sur un scénario consistant mais surtout sur une interprétation solide.Legend perpétue cette tradition mais n’évite pas malheureusement certaines longueusr à vouloir rester constamment trop réaliste. Brian Helgeland avait proposé de meilleurs scénarios dans le passé magnifiés par la présence de grands réalisateurs. En voulant garder un contrôle total sur son œuvre, il prouve qu’il est meilleur scénariste que réalisateur. N’atteignant la qualité des grandes œuvres consacrées à la mafia de Martin Scorsese, Legend s’impose en demi teinte comme un grand film violent et pessimiste sur un Londres gangrèné par la violence entre gangs et dont les frères Kray s’imposeront comme des personnages légendaires.Dans ce monde violent et sans espoir de retour, Legend marque notre mémoire et surtout confirme que Tom Hardy continuera à nous étonner, à prendre des risques et à choisir des rôles intéressants à défaut de se contenter de rôles sur mesure.

Vu le 13 janvier 2016 au Club 13, en VO

Note de Mulder: