Voir du pays

Le cinéma ne devrait pas se contenter de distraire mais également d’amener à la réflexion sur notre société actuelle, ses nombreux travers et ses déséquilibres. Le second film écrit et réalisé par Delphine Coulin et Muriel Coulin a été présenté dans le cadre du festival du festival de Cannes dans la section un certain regard. Il est d’une intelligence et d’une sobriété rare. On découvre ainsi un véritable regard nouveau et féminin sur la guerre en Afghanistan à travers le portrait de jeux jeunes militaires françaises.

La majeure partie du film se passe sur l’île de Chypre sur laquelle plusieurs militaires avant de regagner leur famille en France vont passer trois jours de débriefing parmi ceux-ci se trouvent Aurore et Marine amies depuis l’enfance. Loin d’être de simples vacances sur une terre paradisiaque, c’est surtout un véritable sas de décompression pour faire oublier à ces soldats les horreurs de la guerre et ceux qui sont tombés en zone de combat. Dès leur premier film Delphine Coulin et Muriel Coulin 17 filles (2011) ont montré leur volonté d’aborder des thèmes qui leur sont chers comme l’amitié, l’entraide et surtout les blessures psychologiques qui amènent des personnages à resserrer leurs liens.

Les rôles d’Aurore et Marine sont parfaitement campés par Ariane Labed (Before midnight (2013), Préjudice (2015)..) et Soko (Ma vie n'est pas une comédie romantique (2006), Dans les cordes (2006), Her (2013)). Elles donnent à leur personnage réellement vie par leurs blessures, leur volonté de vouloir vivre et surtout améliorer leur monde. Autant le personnage d’Aurore est expressif et ouvert vers les autres, autant celui de Marine semble marqué par la fatalité et surtout une volonté de trouver sa place. En cela voir du pays s’impose comme un cinéma libre, intelligent et parfaitement campé par des jeunes comédiens préférant un véritable cinéma d’auteur que des productions commerciales sans réelle saveur.

Le constat sur cette guerre en Afghanistan n’est guère positif et montre que les soldats semblent être que de simples pions et n’ont pas toujours les bons réflexes à force d’obéir aux ordres de leur direction. Les nombreux entretiens présentés dans le film montrent bien que la guerre n’est plus une affaire d’hommes mais aussi de femmes courageuses. En cela le portrait de Marine et Aurore donne au film une justesse et profondeur à laquelle nous ne pouvons pas rester insensibles. Il en effet trop rare d’avoir des films aussi maîtrisés par de jeunes réalisatrices que nous ne pouvons que vous encourager à découvrir ce film qui s’impose comme l’un de nos coups de cœur de cette année 2016.

Vu le 21 mai 2016 au Gaumont Opéra côté Capucines, Salle 1, en VF

Note de Mulder: