Moi Daniel Blake

Moi Daniel Blake
Titre original:Moi Daniel Blake
Réalisateur:Ken Loach
Sortie:Cinéma
Durée:97 minutes
Date:26 octobre 2016
Note:

Pour la première fois de sa vie, Daniel Blake, un menuisier anglais de 59 ans, est contraint de faire appel à l’aide sociale à la suite de problèmes cardiaques. Mais bien que son médecin lui ait interdit de travailler, il se voit signifier l'obligation d'une recherche d'emploi sous peine de sanction. Au cours de ses rendez-vous réguliers au « job center », Daniel va croiser la route de Rachel, mère célibataire de deux enfants qui a été contrainte d'accepter un logement à 450km de sa ville natale pour ne pas être placée  en foyer d’accueil. Pris tous deux dans les filets des aberrations administratives de la Grande-Bretagne d’aujourd’hui, Daniel et Rachel vont tenter de s’entraider…

Critique de Mulder

Ken Loach fait partie intégrante de ces grands réalisateurs britanniques œuvrant pour un cinéma social et surtout amenant aisément à la réflexion sur les travers de notre société. Loin du cinéma hollywoodien pour la plupart de temps exempt de toute réflexion sur notre société et prétexte à une multitude de scènes d’action ou farfelues pour surfer sur des thématiques de notre temps, le cinéma de Ken Loach reste indéniablement celui d’un orfèvre. La collaboration fructueuse entre le scénariste Paul Laverty depuis 1995 (Carla’s songà en passant par des comédies irrésistibles (Looking for Eric (2009)) témoigne d’une véritable fusion entre celui-ci et le réalisateur.

Les fondements du film Moi, Daniel Blake se trouve dans le fait que les autorités britanniques depuis le mois d’octobre 2008 peuvent estimés que certaines personnes malades ou présentant un handicap sérieux peuvent réellement travailler y compris si leur médecin du travail refusent qu’ils reprennent une activité professionnelle. Ainsi, le personnage principal Daniel Blake (magistralement interprété par Dave Johns) est un menuisier anglais de 59 ans qui se voit contraint de demander une aide social suite à un grave problème cardiaque l’empêchant de retravailler. Dans son long parcours chaotique pris entre des autorités britanniques le sommant de trouver rapidement un travail et un médecin l’en empêchant il va faire la rencontre d’une jeune mère célibataire et de ses deux jeunes enfants démunis. Traitant parfaitement des travers d’une société britannique nettement plus à l’écoute du milieu social aisé que des milieux populaires le film nous touche en plein cœur par sa grande générosité. Ken Loach une nouvelle fois se révèle être un conteur irrésistible pour croquer les petits tracas de notre vie si ordinaire. Indigné comme le réalisateur par ce système laissant les plus démunis dans la plus grande des pauvretés et par un système social nettement plus enclin à supprimer les droits et prestations diverses que de venir en aide,Moi Daniel Blake s’impose comme une nouvelle réussite indéniable.

L’omniprésence du chômage dans notre société actuelle et surtout cette humiliation que l’on peut ressentir d’être incompris et responsable de la détérioration de notre économie trouve ici avec ce film un écrin prestigieux. Il faut voir ce personnage dans les locaux des services sociaux perdu et délaissé pour réellement s’interroger sur la compétence des personnes travaillant dans ces lieux. La scène dans laquelle ce personnage doit utiliser internet et l’informatique est aussi poignante qu’irrésistible. De la même manière cet atelier CV démontre à quel point les personnes gérant ces parties sont totalement déconnectées du monde du travail. Le scénariste et le réalisateur se sont livrés à un véritable travail d’enquête pour donner à leur film toute la force nécessaire. En cela le cinéma de Ken Loach fait partie de cet héritage culturel que chacun doit défendre. Tourné avec peu de moyen mais une véritable envie de faire du bon cinéma, Moi Daniel Blake s’impose comme une réussite exemplaire. Rares sont les films avec une telle intensité nous serrant si près et nous montrant la misère sociale d’une manière si réaliste qu’elle interpelle et nous renvoie à nos propres blessures. C’est ce cinéma par-dessus tout que nous défendrons toujours pleinement et que nous conseillons réellement de découvrir et de le soutenir. Loin de ces machines hollywoodiennes au budget disproportionné, le cinéma britannique continue à nous interpeller et à marquer nos mémoires. En cela nous ne pouvons que vous encourager à découvrir dès le 26 octobre ce magnifique film d’un des plus grands réalisateurs actuels.

Vu le 21 mai 2016 au Gaumont Opéra côté Capucines, Salle 1, en VO
Revu le 18 septembre au Gaumont Opéra côté Capucines, Salle 1, en VO

Note de Mulder: