Conference-de-Presse - Killing season

Par Mulder, Deauville, 06 septembre 2013

Q : bonjour, j’aimerais savoir si vous vous êtes préparé spécifiquement en essayant de rencontrer en Serbie ou Bosnie des soldats ?

John Travolta : en effet, j’ai eu un travail de préparation qui a consisté pour moi à faire un voyage en Serbie, Bosnie et Croatie pour rencontrer des soldats de cette guerre, comprendre leur expérience et leur motivation dont eux s’inscrivaient dans cette guerre. Je dois vous avouer que jusqu’à présent, cette guerre je ne la comprenais pas bien. Je ne comprenais pas les dynamiques qui la sous-tendent. Il s’agit pour moi au travers de ces entretiens approfondis que j’ai eus avec ces personnes de comprendre mon personnage. C’est le seul moyen que j’ai trouvé de savoir pourquoi et comment cet homme justifie les crimes de guerre qu’il avait eus à commettre et ces entretiens m’ont permis de me faire une raison et d’enrichir mon interprétation.

Q : Vous avez déjà un CV impressionnant, j’aimerais savoir s’il y avait des acteurs ou des réalisateurs avec lesquels vous aimeriez tourner ?

Travolta : Effectivement, j’ai quelques penchants pour quelques personnes avec qui je n’ai pas encore pu travailler et avec qui j’aimerais beaucoup collaborer. J’ai l’habitude de dire que pour nous acteur, notre avenir se joue dans l’esprit d’auteurs, de scénaristes, de réalisateurs. Il se trouve que pour les plus grands rôles que j’ai eus à incarner, je n’avais aucune idée préalable de ce que je ferai un jour. C‘est toujours dans vos esprits à vous que vous nous rêvez et que vous venez à nous et quand les bonnes idées sont là, on entre dans le cheminement.

John Travolta Q : Est-ce que l’équation de votre carrière est le signe de l’évolution d’un intérêt des genres non plus pour les soirées sur les pistes de danse mais plutôt pour la lutte pour la survie ?

Travolta : L’espoir que j’avais avec ce film est plutôt de véhiculer un message pacifiste, contre la guerre car c’est de ces messages là que j’ai été nourri dans le cinéma en tant que jeune des années 60-70. J’ai baigné dans cet idéal-là. Je dirai que mon personnage dans ce film ne joue pas tellement la carte à laquelle vous faites allusion qui est celle de la lutte pour la survie mais davantage celle d’un message contre la guerre et de réflexion susceptible d se caler sur les angoisses créées par cette posture-là. Il s’agit de celle d’hommes qui ont participé à des crimes contre l’humanité. Mais, je ne peux pas négliger cette tendance qui semble être effectivement être celle du cinéma et qui y participe aussi et apparaît également dans toutes les formes artistiques.

Q : Pouvez-vous nous dire comment vous avez décidé d’être acteur et que selon vous du fait que vous incarnez la cool attitude par excellence, qui serait la femme la plus cool du monde ?

Travolta : Pour ce qui est du virus de la vie d’acteur et comment il m’a atteint, il se trouve que ma mère était metteur en scène et chanteuse et comédienne. Dès l’âge de trois ans, je me revois aller deux à trois fois par semaine voir ma mère sur scène. Dès l’âge de cinq ans, c’était ma sœur aînée qui est montée sur scène et c’était pour la voir elle que j’allais souvent au théâtre. Puis, ce fut le tour de mon autre sœur quand j’ai eu neuf ans. J’allais aussi au théâtre pour la voir aussi. J’ai passé mon enfance entre l’âge de trois et douze ans comme un spectateur assidu des membres successifs de ma famille. A douze ans, ce fut mon tour de monter sur les planches. Je dirai que le virus était déjà présent dans les gênes et qu’il a su très vite me trouver. Par ailleurs, il y avait aussi ce goût de la scène et aussi celui du cinéma. Il y avait des films que je voyais très souvent à la télévision comme La Strada donc mon cœur a commencé à balancer comme cela entre la scène et le cinéma. Pour savoir que serait la femme la plus cool du monde à mon sens car pour vous j’ai très longtemps été l’homme le plus cool du monde, je dirai que j’ai un grand faible pour le jeu d’actrice Meryl Streep, Cate Blanchett en raison de leur qualité d’interprétation.

Q : Pouvez-vous nous parler du financement de ce film ?

Travolta : Au sujet de la co-production avec la Belgique et savoir si il y a des spécificités avec une co-production européenne et celle des grands studios américains, il se trouve qu’ aujourd’hui, il devient de plus en plus difficile d’avoir ce type de film qui sont des films à messages et un contenu extrêmement personnel de la part du réalisateur et de la part des acteurs. Cela devient très difficile de les faire financer aux Etats-Unis par les studios Hollywoodiens car ce sont des films qui ne reposent pas sur l’action et sur une visée commerciale. Il s’agit de films ayant une certaine ambition de l’auteur et des personnes qui s’y engagent et il se trouve que c’est ce type de sociétés européennes qui aujourd’hui prennent le risque de lancer l’aventure de ce genre de films. Personnellement, c’est la troisième fois que je fais ce type de films à acteurs avec cette société-là. Je suis très heureux de me dire qu’il y a des personnes qui croient encore en ce type de cinéma et qui lui permettent de survivre.

Q : Pour revenir au message du film, celui-ci parle d’une certaine guerre mais qui est universelle et qui pourrait justement grâce à deux personnes être universelle. Pouvez-vous nous dire quand on est comédien si on est investi complètement quand on prépare un personnage comme le vôtre. Comment avez-vous préparé votre accent car il est étonnant ?

Travolta : Tout d’abord pour ce qui est de l’accent, je dois vous dire qu’il y a eu plusieurs étapes de préparation puisque que comme je le disais je me suis entretenu avec environ vingt-cinq soldats de nationalités serbes, croates et bosniaques et donc j’ai eu leur voix et leur élocution dans l’oreille pendant des mois que je discutais avec eux. Par ailleurs j’avais une coach spécialisée qui était extrêmement talentueuse et qui aux Etats-Unis m’a aidé à travailler ma voix et mon accent. Par ailleurs, j’ai aussi la chance d’avoir un très bon ami bosniaque et un très bon ami serbe et eux non plus ne me lâchaient pas et essayaient de m’aider pour que je trouve l’intonation et l’accent juste. J’avais une armée tout entière qui me soutenait dans cette acquisition-là. Pour ce qui est du travail de recherche et de préparation, il y avait vraiment pour moi deux objectifs de faire ce voyage dans ces trois pays. C’était d’une part de comprendre la guerre, comme je l’ai dit, jusqu’à ce moment-là j’en avais une vision assez confuse et assez peu claire. Cela a été aussi d’autre part de comprendre ces hommes. Savoir comment monsieur tout le monde un matin se trouve happé par la guerre et arrive à trouver une motivation ou une justification pour le fait de commettre des crimes de guerre. Ce fut un voyage, un cheminement qui fut pour moi nécessaire pour incarner ce rôle.

Q : Pouvez-vous nous dire comment s’est passé le travail avec Robert De Niro ? Est-ce que cela a été un véritable échange ? Je suppose qu’il ne s’est pas s’agit d’un travail identique de préparation.

Travolta : Cela a été très simple et très court car nous avons une même approche du métier. Nous ne sommes plus des jeunes. On a de la bouteille et on ne se raconte pas d’histoire. On est professionnel. On respecte le gars qu’on a en face et on sait qu’il voit la chose de la même manière que nous.

Q : Comme vous disiez que vous cherchez à comprendre les motivations de ces soldats, qu’avez-vous découvert ? Quelles sont ses motivations ? Il se trouve que je suis allé en Bosnie après la guerre et je n’ai toujours pas compris. Je suis très curieuse d’entendre votre réponse.

Travolta : pour ce qui est des soldats moyens qui se retrouvent embarqués dans les guerres, la lecture que j’ai eue de leurs trajectoires c’est qu’il me semble que l’homme est fondamentalement bon et qu’il y a cependant des êtres humains qui peuvent être persuadés qu’ils doivent commettre un certain nombre d’actes par des codes moraux qui leur sont transmis. Ils sont pris dans ce chemin là et un fois qu’ils le parcourent les plus sains d’entre eux sont pris de remords. Ceux qui sont déjà atteints dans une certaine mesure par l’expérience qu’ils vivent ont moins de remords. C’est ma vision de la trajectoire de ces soldats. Pour ce qui est de la compréhension de la guerre elle-même ce que mon voyage sur place m’a permis de constater que ces conflits qui sont présentés comme des conflits d’ordre politique et religieux entre ces petits pays ne sont qu’une façade et sont impliqués là des pays bien plus grands et bien plus puissants que les pays en question et les enjeux qui sont les leurs ne sont ni politiques ni religieux mais financiers. Il y avait un intérêt économique et financier pour ces plus grandes puissances que ces trois petits pays qui se déchirent de cette façon. Cela a été une grande révélation pour moi. Je n’avais rien compris de cet ordre là avant d’y être.

Q : Vous nous avez offerts beaucoup de rôles à travers votre carrière. J’aimerais savoir si un jour qu’un metteur en scène vous propose de mettre votre propre existence en scène et raconter votre belle histoire ?

Travolta : Non, très peu pour moi mais je suis sûr qu’après ma mort on fera un biopic comme on a fait pour beaucoup d’acteurs morts. Je préfèrerais que cela ne soit pas moi qui joue mon propre rôle.

Q : j’aimerais savoir quand vous étiez jeune adolescent et quand vous avez commencé le cinéma vous aviez sûrement des rêves, des envies et est-ce qu’ aujourd’hui vous êtes devenu celui que vous vouliez être au début de votre carrière ?

Travolta : pour être tout à fait honnête avec vous, jamais je n’aurai rêvé de devenir ce que je suis et faire ce que j’ai fait. Quand j’ai commencé, j’avais pour seule ambition de gagner ma vie en tant qu’acteur pour pouvoir jouer et ne pas mourir de faim. C’était tout ce que je voulais. Par chance, j’étais entouré par quelques personnes qui eux ont pu croire que je pourrais faire plus que de gagner ma vie honnêtement mais encore une fois c’est parce qu’il y a eu des auteurs, d’autres personnes comme des réalisateurs qui eux dans leur rêve et leur imaginaire m’ont vu autrement dans d’autres rôles que j’ai eu toutes ces opportunités extraordinaires. Je n’ai jamais douté de mes propres capacités. Je me sentais capable de faire beaucoup de choses mais après je ne m’attendais pas à ce que le public, les cinéastes me donnent la possibilité de le faire.

Q : Comment se fait la répartition entre votre métier d’acteur et de pilote ? Avez-vous une même approche et même rigueur entre les deux ?

Travolta : Absolument, je pense personnellement que tout dans la vie mérite une approche professionnelle et méthodique. Quand vous vous apprêtez à endosser un rôle, vous avez une liste de choses à apprendre comme prendre un accent, avoir une attitude physique, porter des costumes. Vous appliquez alors des choses les unes après les autres un peu comme dans un cockpit. Vous devez ainsi respecter un certain nombre de démarches, des règles de sécurité. Cette même rigueur vous permet de mener à bien votre projet et pour ce qui est de la joie que vous donne une démarche comme l’autre, elle est identique.

Q : J’aimerais connaître les difficultés que vous avez pu rencontrer lors du tournage de ce film ? J’aimerais aussi savoir qui serait le nouveau John Travolta ?

Travolta : Je dirais que le défi le plus important que j’ai eu à surmonter pour ce rôle cela a été précisément la préparation, la recherche que j’ai dûes faire sur cette guerre, pour comprendre une guerre qui a eu une envergure internationale. Ce fut assez ardu et assez long. Peut-être la seule préparation comparable que j’ai eue dans ma carrière fut lorsque j’ai dû incarner le Président Clinton car là il a fallu que je comprenne la politique de façon plus approfondie que je le faisais dans ma vie de citoyen. Reconstituer le puzzle qui me permettrait de comprendre mon rôle de façon plus approfondi . Pour ce qui est de mon successeur je ne sais pas.

Propos recueillis par Mulder, le 06 septembre 2013.
Avec nos remerciements à toute l’équipe de Le Public System Cinema
Vidéo et photos : Mulder